Le grimoire

Vintage background with books on a shelf and copy space
Je mets mes pas dans ceux de ma mère avec ” notre ” livre de poésie.

Un grimoire est un livre de magie comprenant habituellement des instructions sur la façon de lancer des sorts, créer des enchantements, se livrer à la divination, fabriquer des objets magiques tels que les talismans et les amulettes ou encore invoquer des entités surnaturelles : anges, démons, esprits ou divinités.

Je fouine dans  le rayon poésie de la bibliothèque (en fait, je cherche Aimé CÉSAIRE) et voilà que ce livre tombe dans mes mains :

Date de la deuxième édition : 1935

Ce livre a successivement appartenu à Simone Jeanjean, ma mère, Anne Massart et Claire Massart, ses filles. Sous le nom des propriétaires successives, de la jolie écriture de ma mère, un charmant petit texte d’Anna de Noailles.

Et, constellant les pages, des annotations, des critiques, des déclarations d’amour, des moqueries, des commentaires vachards ou dithyrambiques. Je sais pourquoi j’emploie le mot grimoire : grimoire c’est le même mot que grammaire, c’est-à-dire l’art d’écrire et de lire des lettres.

Et ce sont bien les premiers pas du lire et de l’écrire, du ressenti des lectures, de la liberté des jugements, de l’esprit critique, subjectivité souveraine.

Quelques exemples : Sido-Simone (ma mère en raison de sa passion pour Colette) à propos de François COPPÉE – mais qui se souvient de François Coppée ? – : idiot – n’aime pas Rimbaud – le traite de fumiste. Et ne pas aimer RIMBAUD, croyez-moi, c’était impardonnable pour Sido-Simone !

Moi, moqueuse du grand HUGO – on ne doute de rien à quinze ans –  biffant de Taritaritari un vers où il est question de fanfare triomphante,  persiflant – gna gna gna L’Oreiller d’une petite fille de la chère Marceline DESBORDES-VALMORE, donnant des 10/10 à BAUDELAIRE, caracolant de HEREDIA en LECONTE DE LISLE, apostrophant MUSSET et VERLAINE… Et soudain, ces vers de Francis JAMMES dans Prière pour aller au paradis avec les ânes :

[…] Venez doux amis du ciel bleu,

Pauvres bêtes chéries qui, d’un brusque mouvement d’oreille,

Chassez les mouches plates, les coups et les abeilles…

[…] Que je vous apparaisse au milieu de ces bêtes

Que j’aime tant parce qu’elles baissent la tête

doucement, et s’arrêtant en joignant leurs petits pieds

D’une façon bien douce et qui vous fait pitié.[…]

J’arriverai suivi de leurs milliers d’oreilles

Et je retrouve une douceur incomparable : la découverte de la poésie. J’en suis saisie.

 

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