Et quelquefois j’ai…

Lorsqu’on tombe sur un livre torrentiel, qu’on tente de regagner la berge et qu’on est repris par les tourbillons, ceux des voix, des mots des images. Épuisant voyage. J’aime quand on sue avec l’auteur (une pensée émue pour le traducteur et l’audacieux éditeur. )

Mais qu’est-ce qui m’a pris de me jeter dans cette histoire ? Qu’est-ce que je fais maintenant avec ces huit cents pages, attrapée que je suis au colback par ce pays et ces gens ? Eh bien je continue, pardi ! Le monsieur qui en parlait à la radio avait raison : c’est un piège !
Même si je me perds dans cette famille de dingues parce qu’ils parlent ou pensent – rien ne permet de distinguer les deux – tous en même temps ! Et il n’y a pas que la famille Stamper, il y a tous les autres, les amis, les ennemis – nombreux, les ennemis ! -, les arbres, la rivière… Il y a un monde fou : ça grouille dans la solitude extrême. Rien à moitié : quand il pleut, c’est diluvien. On est trempés. Quand il fait beau, c’est torride, on sue, on est écrabouillés.
Même si je décroche parfois parce qu’au milieu d’une phrase violente et ordurière à souhait surgit une pépite : Les nuages s’attroupent en provenance du large, bottés de noir et chargés de bravoure à l’approche de la nuit.

Et en cherchant l’Oregon sur une carte (je suis nulle en géographie, surtout celle des états américains !), je tombe sur une rivière Malheur affluent de la rivière Snake. C’est grand, l’Oregon ! (je pense origan chaque fois). Ce n’est sans doute pas la rivière du livre mais l’opportunité est trop belle. Bien que ça rigole aussi beaucoup dans ce livre.


J’avais envie de musique et j’ai trouvé ce groupe, pur jus Oregon ! Et ce titre m’allait bien.
Il y en a d’autres…




Gardez cette image en tête, ce doigt d’honneur défiant la foule qui gronde. Attaché à une perche, un bras humain sectionné à l’épaule flotte au vent, le majeur déplié. Cette scène saisissante ouvre et clôt Et quelquefois j’ai comme une grande idée, magistral roman du défi. Jusqu’à la ruine, jusqu’à la mort, disait Macha Séry en 2013 dans Le Monde après la sortie du livre chez Monsieur Toussaint Louverture, quarante ans après la publication aux Etats-Unis !*

* Ken KESEY Sometimes a great notion, 1964 paru deux ans après Vol au dessus d’un nid de coucou est donc le deuxième livre de celui qui fut aussi – et presque surtout – l’un des inspirateurs les plus importants du mouvement psychédélique des années 1960.
Quelques clefs de lecture avec cette superbe présentation de l’éditeur : fallait oser quand même !




Spécial dédicace Feggari : (…) on n’est réellement fort que lorsqu’on trouve un côté amusant à tout.

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ltdtAdmin
ltdtAdmin
il y a 3 années

Eh Madame? Doucement hein sur le jus d’orange, s’il vous plaît.?
Merci pour cette descente de billet qui donne envie de tailler de la page ! (En aurai-je la force ?)
Ainsi que pour cette mise en avant de la présentation de l’ouvrage par l’éditeur artisan Monsieur Dominique Toussaint Bordes Louverture*, belle passion au noir. Bravo à lui et sa “méthode”**.
Une proche proximité de connaissance?

(*) Amusante intro de sa maison : Monsieur Toussaint Louverture est une maison d’édition qui s’efforce de publier littérature et bande dessinée de la façon la plus aboutie possible. En même temps, on produit de petites choses, un peu n’importe quoi, en fait. Vous aimez ce que nous faisons, vous aimez un peu, vous n’aimez pas, qu’importe, nous, on vous aime et la démagogie aussi.
(**) Article sur Télérama.fr (27/09/2015)

Mina
Mina
il y a 3 années

Dominique Bordes n’édite pas que des livres emballants, il sait emballer ses lectrices avec un emballage-surprise à l’ouverture du colissimo.
Claire, un merci aussi illimité que la ténacité des Stampers. Vous révélez la multiplicité du livre – dont j’entrevois d’ailleurs la couverture des éditions Viking N.Y. – en présentant si bien cette famille dans son combat inique avec la nature hautement souveraine et dont l’art est de se mettre tout le monde à dos, sauf ses lecteurs.
Pas le souvenir d’avoir été trop déconcertée par la narration polyphonique, voire cacophonique, mais j’étais très jeune, bien rodée par Faulkner et aidée, à l’époque, par les jus d’orange….
La frilosité des gdes maisons d’édition françaises omettant un livre majeur de la littérature américaine est consternante. Une envie furieuse de lire la traduction d’Antoine Caze.
Et si on faisait un petit tour avec les Merry Pranksters.

feggari
feggari
il y a 3 années

Pour le côté amusant, en magasin quelques livres de l’éditeur-explorateur qui attendent leur envol : tu sais où les trouver.

Philippierre
Philippierre
il y a 3 années

Merry Pranksters? Ne connaissais pas, ou oublié…
Merci pour cette excavation de carotte tant cône des strates 60! ?

Mina
Mina
il y a 3 années

Intéressant le rapprochement de ces livres différents. Écriture de 1962 à 1964, années écrasantes de crimes et attentats raciaux, déboussolantes par l’impunité judiciaire.
Oui le livre de Kesey est très exigeant et plus déstructuré que Faulkner. Pauses conseillées avec Toole et le désopilant cacatoès.

Philippe
Philippe
il y a 3 années

Je viens de m’apercevoir, avec grande honte, que l’ouvrage en question trône sur la plus haute de mes étagères au-dessus du futon (cadeau Yo ?‍♂️). Il regarde tristement dormir l’amnésique idiot qui l’avait ouvert, commencé, puis oublié. Dans quel état j’err…

Philippe
Philippe
il y a 3 années
Reply to  TempesduTemps

Mince, Yo est, ou va être, au courant de l’affront… ? On va (essayer) de réparer!
Merci pour les conseils lectures en cette période trop juste au corps, l’ample de K. Kensey pour demain funambule.
Par ailleurs, bien aimé le pré carré offert, “La robe” de Adèle Nègre, merci!
(Et certaines photographies ici : https://www.adèlenègre.fr/adele_negre_photographies.html)

Philippe
Philippe
il y a 3 années

Trop vrai pour Yo, on lui répètera!
Et si juste pour la musique, qui donne toujours l’impression de bien lire quand c’est celle qu’on aime. ???

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