Non mais c’est vrai : y en a marre !
Déjà la vie n’est pas marrante avec tous ces imposteurs, ces poseurs, ces menteurs.
Déjà, on est très affectés par des chroniques de morts annoncées, par des agonies de banquises, par des barbaries à l’égard d’êtres humains et de bêtes : pas de liste, vous connaissez les drames des habitants de Gaza, des indiens du Brésil… J’ai dit pas de liste. De larmoyant mon billet va tourner à l’insupportable.
Mais arrêtez de mourir, par pitié ! On est orphelins tout le temps, ces temps-ci, ou en deuil d’un frangin, d’une frangine, d’un ami, d’une amie. Arrêtez de mourir, s’il vous plaît !
Toi, par exemple, tu aurais pu attendre un peu franchement ! Pas d’éloge funèbre non plus. Mais depuis quelques temps, il y a de la perte. Le monde s’appauvrit. Alors on se dit qu’on vieillit nous aussi, que c’est normal qu’ils partent ceux qui nous ont accompagnés dans notre jeunesse, ceux qui nous ont pris par la main, fait rire et danser. Mais on leur en veut. Certains, c’est trop tôt. D’autres, ils ne devraient pas. C’est tout.
Allez, arrêtez, laissez nous souffler. En 2018, elle avait fait fort, déjà. Même si la mort est espiègle, elle qui fait partir le même jour Milos Forman et Jean-Claude Malgoire, elle est un peu insistante et répétitive, collante et chagrineuse, ces temps-ci. Aretha, que je reverrai toujours dans le Think des Blues Brothers ! Quelle pêche ! Yeahhhh freedom !
Et encore avant, et ça je ne lui pardonnerai pas ! Je ne vais pas remonter dans le temps parce que la rubrique nécro deviendrait lourde et pesante. Mais lui… j’ai pris une claque. Midinette, fan, groupie j’étais. Vu l’autre soir dans un thriller glauquissime ! Affaibli déjà mais beau, sombre, présence minérale, enténébré.
Lui, l’acteur mais aussi, l’écrivain, le grand et beau Sam !
Et puis… et puis… Bruno Ganz (ça, j’ai eu du mal aussi), Emmanuelle Riva, Fats Domino, Jean Rochefort, Jean-Christophe Averty, Maria Pacôme, Bernardo Bertolucci et Chuck Berry !
J’en passe et j’en oublie, volontairement et involontairement.
Mais elle, c’est trop. Pas elle. Récemment, un ami m’avait prêté ses ” Courts ” : des petits bijoux ! Elle était libre et insolente. Elle osait et avait raison. ” Cocotte mais pas popotte “. Elle avait des yeux partout, de bons yeux, qui voient juste et font causer juste. C’est injuste. Arrêtez de mourir !
Très bel article, Claire, où je me retrouve complètement. Colère, désarroi, chagrin, nostalgie, révolte… nos cœurs saignent quand il s’agit de nos proches, de notre génération d’amis , de familiers, de nos aimés qui sont partis sur d’autres chemins et cavalent là-haut, forcément là-haut d’où ils nous observent avec curiosité et bienveillance… nos âmes aussi elles saignent au départ des artistes qui ont grandi notre jeunesse, nos pensées, rêves, passions…
Arrêtez de foutre le camp, nous avons tellement encore besoin de vous !
Merci Claire pour ce billet d’humeur qui touche, console à peine, mais dit notre chagrin
À la fois touchée et peinée de t’avoir embarquée dans mon ” ras l’bol “. Tu le dis bien, à chaque fois, un bout de nous qui s’en va. J’ose y voir un côté positif : on revisite le monde des en-allés. De nombreuses personnes vont découvrir le monde merveilleux d’Agnès V. Moi, j’écoute encore plus de Cohen et d’Higelin.
Mais, quand même, comme si le monde se dépeuplait de ses gens de qualité. Ce n’est pas que de la nostalgie de ” nos vertes années “, c’est un appauvrissement.
Bon, il y a des jeunes et beaux talents, faisons leur confiance. J’ai eu un coup de blues mais on continue, hein, avec nos beautés (tes paysages !) Avons-nous le choix ?
Merci de ta réceptivité, Joëlle.
Emmanuelle Riva sur ton bandeau du haut ? Quelle tristesse, et de la voir vieilli aussi. Et Bruno Ganz.
Je dirais même « arrêtez de vieillir » c’est presque plus insupportable.
Certains sont éternels, Cohen dans ce beau here it is que tu nous offre ici.
Oui, la belle Riva… Certain(e)s ne me dérangent pas du tout quand ils sont vieux : je les trouve magnifiques, puissants et calmes. Jeanne Moreau était très belle. Tant qu’ils sont là et peuvent créer ou donner leur art, ça va : regarde, A. V. a travaillé jusqu’au bout.
Ce Here it is me hante, comme une sicilienne inconsolable…
Bien dit, merci.
Mais aussi quelle idée de se faire photographier avec un panneau d’interdiction de dépasser le 90!!! Elle me manque : vu récemment Les glaneurs et la glaneuse dont je ne connaissais que des extraits. Visionnaire!
Tu m’as fait rire ! Ainsi que le rectificatif d’après… Humour ! J’adore cette photo. J’ai eu du mal à choisir car il y en a tant où elle est drôle. Superbes Glaneurs et glaneuse !
J’avais beaucoup aimé Visages Villages (avec JR) : tendre.
Oui, elle va manquer…
Ah non pas réveillée en fait le panneau indique qu’elle DOIT dépasser le 90…
Beau billet, merci. N’oublions pas que tous les artistes sont tous déjà morts. Surtout les meilleurs, plus vivants que les autres.
Si vous avez un peu de temps, ici la têtue Agnès V. s’exprime justement sur son travail manuel à bras le corps, puis la tête : https://www.franceculture.fr/emissions/plan-large/hommage-agnes-varda .
Avec une préférence pour ces Quelques veuves de Noirmoutier.
Zut ma réponse finit sa course aux oubliettes car je suis allée sur le lien trop vite (à propos, où parle-t-elle de Veuves de Noirmoutier qui m’intriguent car sur la page Plan Large, il y a plein de trucs)
Pour les zartistes, j’en côtoie de biens vivants, modestes et vaillants, allons !
Et merci.
Quoi, les artistes sont tous déjà morts ? C’était mieux avant ?
Un bon artiste est un artiste mort ! Ouarfffff
Aucune nostalgie. Je voulais parler de cette part de résurrection dans la création.
Pas d’accord avec cette chronique ! Et surtout avec son titre. Faut-il rappeler le triste sort de Tithon, à qui Zeus accorda l’immortalité mais sans jeunesse éternelle ?? (encore que selon certains il aurait finalement été transformé en sauterelle mais c’est une façon d’en finir qui n’est pas donnée à tout le monde). Tous ces gens dont tu évites de dresser la liste ont bien rempli leur rôle, laissé de belles traces, et il fallait bien que ça s’arrête. Et mieux vaut souvent mourir à 27 ans (les exemples sont nombreux et pas seulement en rock’n roll (cf Peter Collins, Elisabetta Sirani, et beaucoup de chauve-souris…) que ne pas vouloir mourir. D’ailleurs il n’existe pas de beau vieillard.
Quelle diatribe ! Je reconnais bien là, Grancapo, votre extrême réserve quant à la vieillesse : le naufrage, au moins, dans son tragique, a quelque chose de beau. Mais la jeunesse éternelle… Quel ennui ! N’en gardez-vous que de bons souvenirs ?
Mourir à 27 ans, c’est quand même tôt et vos exemples (il faut que j’aille voir de plus près concernant la dame) laissent entendre que eux sont loin d’avoir dit tout ce qu’ils avaient à dire !
Il existe de beaux vieillards. Mon titre était ” pour de rire ” : on mourra tous, zartistes ou pas.
Il faut que j’aille voir aussi la durée de vie des chauve-souris et par combien – comme on le fait pour les chiens et les chats – il faut multiplier pour avoir l’équivalent en âge d’humain.
À se revoir, mon vieil ami !