Je pars de mots que j’aime EAU, bien sûr et dans la foulée le fameux OISEAU qu’on ne peut qu’illustrer par la devinette de Voltaire :
Cinq voyelles, une consonne,
En français composent mon nom,
Et je porte sur ma personne
De quoi l’écrire sans crayon.
Bien sûr, on file sur l’étymologie, mot que j’ai toujours envie d’affubler d’un H – et non d’une H(ache) – pour faire plus savant.
Alors, qu’avons-nous là ?
voieus, de *voiel « vocal », du lat. vocalis « qui fait entendre un son; voyelle », v. vocal.
Donc la voyelle est faite pour vocaliser.
Reprenons la passionnante histoire de l’alphabet. Ce sont les phéniciens installés dans l’actuel Liban qui ont conçu les lettres du premier alphabet, au XIIIe siècle av. J. -C. Il comprenait 22 consonnes. Vous les trouvez dans le cartouche à gauche avec la correspondance en latin et en arabe et à droite également.
Vous remarquez bien sûr l’absence de voyelles.
Et voici ce que dit Hérodote :
Οἱ δὲ Φοίνικες οὗτοι οἱ σὺν Κάδμῳ ἀπικόμενοι, τῶν ἦσαν οἱ Γεφυραῖοι, ἄλλα τε πολλὰ οἰκήσαντες ταύτην τὴν χώρην ἐσήγαγον διδασκάλια ἐς τοὺς Ἕλληνας καὶ δὴ καὶ γράμματα, οὐκ ἐόντα πρὶν Ἕλλησι ὡς ἐμοὶ δοκέειν
« Pendant le séjour que firent en ce pays les Phéniciens qui avaient accompagné Cadmus, et du nombre desquels étaient les Géphyréens, ils introduisirent en Grèce plusieurs connaissances, et entre autres des lettres qui étaient, à mon avis, inconnues auparavant dans ce pays. »
Hérodote, Histoires, V, 58 (traduction Larcher, Paris, Lefevre et Charpentier 1842)
Donc, Cadmus (ou Cadmos selon les sources) fait cadeau aux grecs de ces merveilleuses petites lettres qui vont tout changer ! C’est, bien sûr, la version courte de l’histoire.
Et même, luxe total, parfois deux prononciations pour la même lettre : les noms de quelques lettres grecques nous précisent leur prononciation comme ο (omicron = o petit) et ω (oméga= ô grand) ou ε (epsilon = é pincé) et η (êta = è ouvert).

Et si notre langue n’a pas d’accent tonique – nous, les japonais et quelques autres – non seulement accentuons les voyelles mais en plus nous avons trois accents à disposition : l’aigu, le grave et le circonflexe ! Sur notre clavier, une touche rien que pour le ù utilisé uniquement dans le mot où ! Sont fous ces gaulois !
On a comme ça quelques coquetteries : par exemple, la langue française n’aime pas quand deux voyelles se suivent : impossible de dire ma armoire.
Et pauvres étrangers : allez leur faire comprendre comment bien prononcer la paume et la pomme, le heaume et l’homme…
Un ami m’a suggéré d’intituler ce billet Histoire d’O mais le titre est déjà pris. Et puis une seule voyelle alors qu’on en a six dont le beau i grec !
Un site formidable pour l’histoire de l’écriture : Bnf – L’aventure des écritures
Et bien sûr, Mozart !
cOOl, ありがとう!
On a le sentiment de retrouver un vieil album de famille, on en reconnaît certaines, d’autres ont bien changé, mais leurs noms sur le bout de la langue…
Rimbaldiennes marraines!
Oh oui, je suis chez moi même si j’ai égaré quelques clefs ou ne les ai jamais possédées. Mais on voyage dans les racines de l’arbre-langue. Sacré périple, périple sacré.
Rimbaud, roi des synesthètes ! (voir ce mot = passionnant ! sujet d’un autre billet à venir)
Synesthésie? Je ne connaissais pas bien sûr, et à peine mon “correcteur” d’orthographe qui ne reconnaît même pas synesthète…
Je réserve tout de suite mon billet pour ces bordures aux «parfums pourpres du soleil des pôles» à découvrir !
Le Plus amusant c’est que la plupart de synesthètes ne savent pas qu’ils le sont et pensent que tout le monde associe chiffres, lettres, sons à des couleurs ! Tu as sûrement vu de nombreux musiciens et peintres dans les synesthètes célèbres, de Duke Ellington à…Lady Gaga ! Baudelaire, bien sûr : Il est des parfums frais comme des chairs d’enfants,
Doux comme les hautbois, verts comme les prairies […]
De qui sont tes ” parfumes pourpres ” magnifiques ?
Oui, pas mal d’artistes, et en amount figures de style, poésie, pour cette “perception anormale d’une autre sensation que celle perçue normalement”. Rhétorique à vos papiers !
Sombres clics donc, pourpre d’une seule Illuminations que je vous imaginais en nez à souhait, celle de notre roi des synesthètes !
Au plaisir de lire en corps.
Alors, merci Arthur ! Et pour ” l’anormalité de la perception “, je glousse ! Et pourquoi pas, tant qu’on y est, cinglée, barrée, barjot, jobarde, folle, démente, délirante, insensée, dingue, perchée… Ah la normalité ! Poètes des yeux et des sons, unissons nous dans la grande yoyoterie !
“Perché(e)” m’a toujours paru si juste pour décrire l’autre sur sa branche, son ciel envié, notre rez-de-chaussée lesté. Peur et admiration.
Et merci pour ce “Yoyoter”, inconnu jusqu’à présent mais vite adopté avec un tel “Yoyotassions” pour subjonctif (im)parfait. Unisson !
Juste pour rappeler, en passant, que CHAUVE SOURIS contient toutes les voyelles (le Y (Upsilon) se retrouvant dans le U. “Je suis oiseau, voyez mes ailes…”
Mais bon sang, où avais-je la tête ? Bien sûr que ces admirables bêtes sont porteuses de TOUTES les voyelles ! Nous y penserons lorsque nous les verrons…
Et peut-être les baptiserons-nous ainsi : ” Tiens, voilà Alpha, mais non, c’est Upsilon ! ” etc.
Comme les Grecs ne font pas simple, sur 7 voyelles deux sont inutiles et toutes peuvent être accentuées : bazar chez les chauve-souris ! Un Grec à qui je demandais si je devais mettre un “o” ou un “ω” dans tel mot, me répondit “tu le sentiras”. So greeeeek…
Quelles voyelles sont inutiles ? On connaît les langues où les voyelles sont accentuées et parfois même, si cela ne va pas de soi (comme pour les grecs – sourire), on met le petit coup de pinceau…
La quasi mère des langues est tellement riche ! Je devrais au moins en mémoriser les voyelles. Cours de grec bientôt, hein ?
ο et ω (les 2 se prononcent “o”) – η et ι (les 2 se prononcent “i”). Héritage du grec ancien.
Je croyais qu’il y avait une différence, genre O fermé et O ouvert. Bref, je serais bien incapable de faire la différence en grec !
Cet empan dans l’expression écrite, si largement pardonné, existe-t-il de fait à l’oral? Ce qui est entendu, n’est-ce que ce que j’ai compris (ou presque, qu’importe)?
Pour, par défaut, conflit hors-jeu (Japon)?
Ou davantage bonheur à argutie?