Saudade

De la saudade, du fado de Coimbra et de quelques Machado…

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(Cet arbre est portugais, je sais, ça ne se voit pas)

Saudade, ce terme réputé intraduisible, dont on trouve pourtant des équivalents dans de nombreuses langues (blues en anglais, hâl en arabe et en persan, dor en roumain…), correspond en effet à un sentiment de nostalgie teinté de sensualité et de fatalisme, que les élans du fado savent exacerber. Quant au mot fado lui-même, souvenons-nous qu’il dérive du latin Fatum,  destin”.

Eh bien moi, j’aime beaucoup qu’un mot soit intraduisible ! C’est peut-être ça, l’identité nationale… (Suivez mon regard !), un mot intraduisible.

Quelqu’un me parlait de Misia, il y a peu (il ou elle se reconnaîtra) et j’ai eu envie de parler du fado, du Portugal, de la saudade, d’Amalia Rodrigues.
Et puis, je me suis souvenue d’un concert enregistré il y a très longtemps aux Entrepôts Lainé à Bordeaux  : c’est une K7 qui pleure beaucoup maintenant. Un monsieur qui s’appelle Fernando Machado Soares présentait le concert. Il parlait bien le français et en évoquant la tristesse d’une chanson, il a dit : “Attention, cela pourrait vous contagionner.” J’ai aimé ça et… j’ai été contagionnée. Les musiciens jouent avec des guitares qui ont au moins 15000 cordes. Et une de ses chansons disait : “il y a toujours quelqu’un qui résiste ; il y a toujours quelqu’un qui dit non.” En portugais –  langue presqu’aussi belle que l’italien, allez, aussi belle, de ces langues à chanter – c’était sublime, une histoire de vent qui amène des nouvelles… La voici par un autre chanteur : Antònio Bernardino

Et puis et puis, comme je suis inconstante et change facilement de registre, j’ai pensé à un autre Machado, l’espagnol, dont j’avais appris un poème magnifique au lycée : je ne l’ai pas retrouvé. Peut-être était-ce :
Caminante son tus huellas el camino y nada más
[Voyageur, ce sont tes traces le chemin et rien de plus] Caminante no hay camino, se hace camino al andar
[Voyageur, il n’y a pas de chemin, on trace son chemin en avançant]
En le cherchant, je suis par contre tombée sur des traductions de ses poèmes (merci Gougueul) qui auraient beaucoup plu aux surréalistes… Bref , je vous livre ceci, juste pour boucler la boucle : le poète *Antonio Machado (1875-1939). Poète difficile à analyser, impossible à traduire.

Azulejo%20Caravelas

Et voilà, je n’ai pas parlé du fado, surtout celui de Coimbra qui est spécial, un fado chanté par les hommes, un fado d’étudiants en cape noire.
Un jour de saudade, sûrement… Un jour d’Azulejo, bleu comme le blues.
Avez-vous remarqué qu’on ne dit plus du tout “j’ai le cafard” ou “j’ai le blues” ? (encore moins le “spleen”).
Mais comment disent-ils, aujourd’hui ?
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massart Nana
massart Nana
il y a 13 années

Amalia Rodrigues, J’ai encore son timbre de voix dans les oreilles. Cette voix qui sort des tripes, du coeur qui vous torture et vous délivre enfin.. Ce chant profond de manque (qui nous effleure
parfois) accompagné par des intruments à cordes pincées m’enchantent…

TempesduTemps
TempesduTemps
il y a 13 années

Ça me plaît beaucoup cette notion de manque. L’élégante mélancolie qui vient du fond du coeur et du corps. Une voix superbe, vraiment, sui vi par quelques autres, dans la tradition
et le renouvellement. Et les guitares qui soutiennent le chant. Oui, de la musique vraie !

warren
warren
il y a 13 années

http://www.youtube.com/watch?v=MiyZJX-V1dg

C’est moi! je t’avais envoyé ceci dernièrement … c’est Mariza.  J’aime aussi le son des guitars portuguais, douze ‘strings’ … Une voix et un instrument, c’est le bonheur!

TempesduTemps
TempesduTemps
il y a 13 années

Oui, c’est vrai ! Maintenant, nous voyageons avec nos oreilles.
J’ai failli mettre en image le collage que tu as, celui qui s’appelle “Azulejo” justement !
Bonne journée, Warren

Brigitte giraud
Brigitte giraud
il y a 13 années

Une fada à la fêlure qui laisse passer la lumière, tu te souviens ?
Je me souviens d’une couverture de Charlie Hebdo, il y a très longtemps, dans les années 75, Reiser avait dessiné son bonhomme, en haut d’une montagne, qui disait : “le ciel est rouge, demain il
fera beau !” Comme si la France allait se soulever encore et qu’aujourd’hui, c’est pas demain, mais un peu plus tard…
Allez, le café en terrasse et au soleil, c’est pour bientôt quand même, et on refera la monde à nous toutes les deux, et toc !

TempesduTemps
TempesduTemps
il y a 13 années

Yes yes et yes !
Et aujourd’hui, ce sera pas saudade, ni fado.
Mais rock’d roll et tap-dance
En attendant demain, non, sans l’attendre  !  Faut pas attendre.

Brigitte giraud
Brigitte giraud
il y a 13 années

Mercedez Sosa, c’est pas mal non plus pour le fado. Est-ce qu’être fada désigne un être empreint de fado ? C’est ptête possible, non ? Enfin, c’est pas sûr.
Oui, comment ils disent les djeunes ? “J’chuis dégoûté grave”, quelque chose comme ça, ou bien quoi ?
N’empêche que c’est beau, c’est beau, mais ne remonte pas trop les méninges du moral…
Prends soin de toi, ma belle.

TempesduTemps
TempesduTemps
il y a 13 années

Oh, ça m’aurait bien plu le ou la fada, en proie au fado… Mais c’est pas mal non plus :
Fada : servi par les fées car fado, en provençal, c’est la fée. Tu te rends compte ? Nous sommes fadas, peuchère !

C’est le petit coup de mou de la pleine lune, ou la fatigue post-tempête, ou les machines qui me “dégoûtent grave”…

Voui, demain, il fera jour.

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