Le magicien Julio

Julio Cortazar, l’écrivain politique, poétique, fantastique…

Nous n’entrons pas dans l’irréel avec Julio Cortazar ; nous glissons dans un autre réel. C’est dans la proximité de cet autre réel que Julio Cortázar m’a donné à lire les pires angoisses, les plus simples, les plus vraisemblables… Il faut s’y faire : avec Cortazar, on change de niveau entre les réalités, on attend l’inattendu.

Comment exprimer plus simplement le malaise lorsque le héros, l’anti-héros du petit conte enfile un pull et…se perd à l’intérieur, ne trouve plus la sortie (Bestiaire) ou bien, quand ces papillons se posent sur le visage de Severo jusqu’à le couvrir entièrement (Les Phases de Severo) ?

Le grand fauve tranquille, avec son faux air d’Antonio Banderas est parfaitement argentin : né à Bruxelles, mort à Paris, exilé volontaire, fou de tango…cortazar
Et puis tout ce bestaire imaginaire, foisonnant, baroque :
“ll faut vous dire que les tortues sont grandes admiratrices de la vitesse et c’est bien naturel.
Les Espérances le savent et s’en fichent.
Les Fameux le savent et se marrent.
Les Cronopes le savent et chaque fois qu’ils rencontrent une tortue, ils sortent leur boîte de craies de couleur et, sur le tableau rond de son dos, ils dessinent une hirondelle.

On ne s’étonnera pas du tout d’apprendre que Julio Cortazar aimait le jazz pour sa liberté de mouvement, d’improvisation, comme, ainsi qu’il le dit, la peinture délivrée du représentatif peut enfin n’être que peinture. Cf. L’Homme à l’affût, bio à peine déguisée de Charlie Parker.

“Cette attitude de complicité que je demande à mon lecteur, c’est finalement une sollicitation de déclaration d’indépendance intérieur de chaque individu, au lieu de l’état d’hypnose dans lequel la littérature classique a voulu presque toujours placer le lecteur.”
(Entretien avec Jean Montalbetti in le Magazine littéraire, janvier 1984)

Lui aussi nous laisse libres et c’est bien bon !

Une version russe , pourquoi pas ? Tango sans frontière !

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véronique
véronique
il y a 12 années

Commencé Marelle avant-hier? Peut-être aurais-je dû attendre 2011… Je crois que je vais bientôt abandonner… Comme dans certains morceaux de Mozart, trop de notes… Trop de mots…
Impressionisme, pointillisme et puis je n’aime pas le surréalisme de Delvaux… J’aurais bien voulu faire partie du club cependant…Quelle thérapie me conseillez-vous? Ecouter du tango?

TempesduTemps
TempesduTemps
il y a 12 années

Laisse tomber Marelle… Il y a tellement plus délicat et fin. Tu sais, “ils” disent que c’est son chef-d’œuvre mais faut toujours se méfier de ce genre de guide-ligne. C’est diktat et
compagnie. On fait ce qu’on veut… Oui, on écoute du tango.

Thérapie ? LIBERTÉ !!!!! Libertango

Vwxz
Vwxz
il y a 12 années

Cette idée de solliciter l’indépendance du lecteur au lieu de le confiner à l’état d’hypnose attise la curiosité. Je me demande ce qu’il entend par là concrètement, c’est-à-dire comment fait-il ?
et est-ce réussi ?

Je ne sais pas comment on va faire, mais il va falloir que tu me prêtes toute ta bibliothèque ou alors que tu arrêtes d’écrire sur les livres !!

Et ce p’tit tango gardélien, huuuuuum … J’adore le tango, même les plus ringards, c’est dire.

TempesduTemps
TempesduTemps
il y a 12 années

Par exemple, dans Marelle, c’est toi qui construis le déroulement du récit en choisissant l’enchaînement des chapitres (voir commentaire Véronique). Comme pas mal d’écrivains de cette
époque, Cortazar souhaitait un lecteur ACTIF. Il est vrai que l’injonction est un peu paradoxale dans la mesure où certains de ses contes t’embarquent totalement !

Moi aussi, gaga de tango et les pionniers, sans être puriste, sont quand même l’origine de cet art qui, encore aujourd’hui, se porte bien et même évolue encore ! Le tango est vivant !

véronique
véronique
il y a 12 années

J’ai Marelle (Rayuela) dans ma bibliothèque depuis des années offert par quelqu’un qui m’a mis ça entre les mains alors que je connaissais (je ne connais toujours pas) pas Cortazar. Merci à vous
deux de m’aider à prendre la décision d’ouvrir enfin ce livre en 2011. IL paraît que l’on peut “construire” soi-même la narration en modifiant l’ordre des chapitres… et personne ne le lit
jamais le même livre. Je trouve l’idée géniale!

TempesduTemps
TempesduTemps
il y a 12 années

Je n’ai pas lu Marelle… mais le mode d’emploi est donné par Cortazar lui-même. L’idée est effectivement très séduisante et “oulipienne”, assez virtuose donc. Si par malchance, tu
n’entres pas dans ce livre, dis toi que Julio Cortazar en a écrit plein d’autres, très déroutants aussi et magnifiquement écrits ! Que 2011 soit livresque ou ne soit point !

Lucie
Lucie
il y a 12 années

Pour le moment j’ai aimé tout ce que j’ai lu de ce type. Il est génial. C’est marrant il y a quelques jours j’ai décidé que le moment était venu de lire “Rayuela” et je suis allée le chercher à
la bibliothèque. Je l’ai trouvé mais il n’était pas bien beau cet exemplaire et j’ai pensé que j’allais l’acheter plutôt. Ce sera pour 2011 sans faute.

TempesduTemps
TempesduTemps
il y a 12 années

Et bien sûr, tu le lis en espagnol ! Veinarde. À l’IUT, j’avais travaillé sur Queremos tanto a Glenda et j’avais adoré ! Sur Marelle (Rayuela en spanish), j’ai lu des
tas de trucs passionnants et notamment que c’est un livre qui swingue… Tu vas l’acheter en français ou en espagnol ?

Il va neiger…