Ou… Bonnard et Vuillard sont dans un bateau.
Je dis ça parce que ce billet est parti d’une toile magnifique de Bonnard L’Atelier au Mimosa, toile toute occupée par une immense baie vitrée donnant sur un amas jaune : le mimosa… Et aussi par ce que Bonnard disait : “Ce qu’il y a de mieux dans les musées, c’est les fenêtres.” Alors, voilà, Vuillard, l’intérieur et les fenêtres (et de nombreuses femmes de dos).
Gloups, à gauche, c’est Kandinsky – mais oui – et ce sont des portes, mais ça dit quelque chose déjà : ça dit l’intérieur, comme chez Vuillard “où l’indécis au précis se joint “( Verlaine) , où les couleurs sont en sourdine.
Autre rapprochement possible : l’écho des montants des portes et des fenêtres qui traversent verticalement les toiles.
Une personne près de la fenêtre
Intérieur plein
Présences mais
si peu présentes
Des gens dedans
et dans eux-mêmes, dans “le monde obscur de l’indéterminé prédisposant à la pensée» (Mallarmé).
La Lampe – Vuillard
« D’où le triomphe du mot “nid” pour désigner le logis. On comprend donc la raison d’être du capiton et des drapés : ils sont destinés à donner à l’appartement une douceur maternelle et, en même temps, à cacher“* ; et on sait l’ importance des tissus dans la maison : la mère est couturière.
Posées comme pour une photo, (souvent, Vuillard prend son Kodak et saisit un “instantané” ), ressemblant à des décors de théâtre – qu’il exécutera aussi pour des pièces d’Enrik Ibsen, Maurice Maeterlinck, Maurice Beaubourg ou Henri de Régnier – les toiles de l’intérieur sont majoritaires et c’est un intérieur chargé, plein comme un oeuf, chamarré, presqu’étouffant : heureusement, il y a les fenêtres !
Musique : il y avait Les Fenêtres de J. Brel mais l’oeuvre de Vuillard fait tellement penser à une musique de “chambre”, intime, feutrée que le quattuor s’impose.
*Anne Martin-Fugier dans La Bourgeoise (Hachette).
“une toile magnifique de Bonnard: L’Atelier au Mimosa”
oui magnifique, bien qu’elle manque dans ce billet…, avec son trop plein de couleurs subtilement mis en scène par un cadrage presque carré, ce qu’aimait particulièrement Bonnard ( il n’a pas eu
le temps de m’envoyer un mail pour confirmer, mais je sais qu’il photographiait souvent avec un Rolleiflex dont le format du négatif est 6cm x 6cm).
Le cadrage carré finit souvent en un cadrage presque vertical mais au final c’est en fait davantage une mer à l’horizon tronqué qu’un
MonumentalMontSaintMichelToutDebout.
Ce qui oblige l’oeil à deviner ce qu’il manque à gauche, à droite et à jouir de ce qui est finalement resté, de ce qui a été choisi, de ce qui nous est
soudain offert.
Tout l’art du cadrage: serrer, laisser fuir. Aimer de loin, au près.
Bonnard est un grand photographe.
Cartier-Bresson, de son vif juste coup de pinceau habituel, l’a très bien portraituré tout horizontalement dans son atelier, les yeux perdus sur un coté, trop
large… trop seul, trop fluide hors huile.
Et voilà que l’oeil du pro me fait regretter de ne pas avoir mis le fameux “Atelier” que j’ai vu de mes yeux (Le choc !).
Je vais chercher les photos de Bonnard et celle de Cartier-Bresson ; ce que tu dis sur le cadrage est passionnant : ça va en intéresser plus d’un(e). “Serrer, laisser fuir” dis-tu, toute une
vie !
Merci, PPP
J’aime beaucoup les fenêtres,Elles me font penser à des miroirs changeants… Il y en a de si tristes si étroites et d’autres si pimpantes et lumineuses ouvertes sur le monde.
(Elles reflètent le caractère des gens).Quand je reprendrai les pinceaux, je m’y plongerai…
C’est vrai ça, des miroirs qui renvoient toujours une image différente. Et tu sais, il y a des peintres que ça a beaucoup travaillé, cette affaire là. Et même des poètes. C’est la frontière entre
dedans et dehors, le passage. Nos fenêtres sont nos yeux.
allez,à moi contesse deux mots!!!
je te suis sur tes chemins ,…à distance… du coin haut ,à droite du tableau et tous les soirs je regarde …ou tu t’assieds Chèréhasarde pour nous chuchotter tes égards d’âme< en
étrange pays dans ton pays lui-même>
et…je m’étonne que tu n’ aies pas encore croisé Virginia Woolf dans tes escapades !!
si tu ne connais pas l’ensemble aromates ,pousse jusqu’au jardin des myrrhes ; c’est réjouissant
Mon camarade Romano m’a donné hier la définition du peintre :… c’est un type qui attend que la peinture sèche!… j’adore !
Voilà ,tu vois, c’est fait ,je suis nettement venue, pour te faire une surprise et avant de complètement débloguer je regagne le haut du tableau…
martin
Chouette de te trouver là, toi qui attends que la peinture sèche !!
Et attends, attends pour Virginia Woolf, tu vas me couper la myrrhe sous le pied !
Quelle jolie façon de se dire bonjour, de partager des points de suspension, des ponctuations anarchiques !
Bien à toi, à demain peut-être.
Les fenêtres (et les portes, mais les fenêtres c’est encore différent) sont fascinantes. Suffit de lever la tête, le soir, dans la ville. Que font-ils tous ces gens derrière leurs fenêtres,
derrière leurs rideaux, dans leur maison, leur appartement, leur “logis”, dans leur nid dis-tu ? Que font-elle toutes ces vies ?
Et on peut ainsi construire des récits, l’imaginaire peut bien galoper s’il lui chante de galoper… C’est très inspirant, une fenêtre ! ouverte, fermée… Entre voilement et dévoilement…
Nous avons tous l’expérience de “l’intérieur ” et de “l’extérieur”, du dehors et du dedans.
Lieux de l’intime et lieux publics… Et je vois que tu te places dehors. As-tu vu comme Vuillard aime sa bulle ? Comme il peint l’intime sans l’intimité ? Là, c’est l’extérieur qui est laissé à
l’imagination, à peine convoqué par les fenêtres.