Pourquoi suis-je particulièrement touchée par les toutes petites choses, bêtes, fleurs et autres créatures ? Je ne suis pas la seule, je pense. Ce n’est pas le côté gnangnan, mignon, kawaï, chouchou… Non, c’est autre chose.
Même s’il y a de ça, ce n’est pas seulement une espèce d’empathie pour le fragile, un désir de protection du riquiqui. C’est encore autre chose.
Peut-être est-ce la porte d’entrée sur le monde : comme ses proportions sont petites, il nous faut plisser les yeux, nous concentrer, aller au plus près, ajuster la focale.
Clarisse Méneret qui signe la photo de Une et celle à gauche connaît bien cet affûtage du regard. Comme si elle attirait les minuscules. Et inversement.
Les minuscules… comme les Vies du même nom, si beau livre de Pierre MICHON ! Voilà… on est dans l’humble (humus), l’infime, le presque rien mais VIVANT !
Des miettes – comme Miette de Pierre BERGOUNIOUX – mais des miettes sublimes qui nous emportent dans l’intime de la terre, comme un chuchotement. Le ” Penche toi à l’oreille un peu basse du trèfle ” de René-Guy CADOU ou le superbe film d’animation Minuscule (voir vignette musicale).
C’est ce qu’il faudrait faire quand on marche en forêt, baisser les yeux. On est entouré de grands arbres, on a tendance à regarder vers le haut – attention aux souches quand même – pour débusquer le geai, voir la canopée ou la course du vent.
Mais au sol, il y a tant à voir aussi : ces petites mousses qui semblent des forêts vues du ciel, ces cailloux que je cueille parfois pour leur couleur insolite et certaines feuilles. La dernière qui m’a littéralement happé les yeux :
Je ne parle pas des objets. Ça frise le fétichisme. Restons avec les animaux : voici ma dernière visiteuse, sortie de je ne sais quel légume. Et toujours la noisette pour l’échelle.
Pas de doute : on entre dans un autre monde. On s’accroupit. On s’amenuise.
On rampe. C’est bon pour l’ego. Les myopes sont contents.
C’est un très grand monde que celui des minuscules.