Nous partîmes joyeux et confiants ; l’initiateur de l’expédition avait le plan en tête. Objectif : retrouver la source du Né. Elle existe, bien sûr. Il faut bien qu’une rivière naisse quelque part ! Il faut trouver la naissance de ce ru. Elle est sur la carte IGN : le Né prend sa source LÀ ! C’est qu’il est tout petit sur la carte, ce départ de rivière.
Nous tournicotons dans la campagne, la conductrice concentrée écoutant scrupuleusement les indications du copilote – alors qu’il y a tant de jolies maisons et des fleurs magnifiques partout – et à l’arrière, le grand chien et la narratrice. Nous savons qu’il faut suivre l’indication Lieu dit Chez Guitard, ce qui est plutôt sympathique ! Ça donne envie de chanter :

En passant par chez Guitard, pour trouver le Né (sur un air et même deux bien connus… ceux qui trouvent le signalent.)
Mais il est bien caché, ce Né ! (Oui, bon..)
Nous nous arrêtons près d’un étang, en faisons le tour, croisons des épeires et un bourdon gourmand de marjolaine auquel je chante un autre air connu (2ème devinette). Au centre de la pièce d’eau, un exutoire : serait-ce la source ?
Une agitation s’empare du petit groupe. L’aurions-nous atteinte, la source du Né ? Un doute subsiste, les questions affluent (oui, bon, bis).

Puis nous apercevons plus loin, en contrebas dans la campagne une ligne d’arbres… Abandonnant notre étang, ses épeires, ses bourdons, ses reflets superbes, nous nous dirigeons vers ce qui pourrait bien être le but de l’expédition ; nous voyons des iris d’eau : très bon signe !

Les iris ou Flambes d’eau ou – comme le disait ma provençale de mère – les glais d’eau veillent sur le bébé ruisseau, elles le parent, le chantent, veillent sur lui. Il est si petit. Il ira plus loin alimenter la Charente, il aura grandi, histoire d’affluents et de confluents. Je ne peux m’empêcher : je trempe mes mains, je mets les doigts dans le Né.
Nous sommes satisfaits. Nous nous congratulons façon Stanley sur le lac Tanganyika : “Docteur Livingstone, I presume”.
Voilà, l’expédition est finie. Comme toute exploration, elle aura permis de nombreuses découvertes, des hésitations, des rencontres imprévues, des douceurs végétales et aquatiques.
Hésitation pour la vignette musicale : bien sûr, Manon des Sources… Et puis La Source, album de Jajouka , groupe de bergers marocains « Un groupe de rock vieux de quatre mille ans », disait William Burroughs. Et enfin, je pense à Schubert, naturellement et je tombe sur ceci : extrait de La Belle Meunière, une adaptation et cette voix magnifique ! Wohin = OÙ ?
Au risque de décevoir nos trois intrépides aventuriers, je ne suis pas convaincu par leur découverte et trouve qu’ils se sont complaisamment congratulés. Je les engage à revenir sur place et nous expliquer comment leur source peut se trouver ” en contrebas ” de l’étang, à moins de vérifier qu’il s’agit de deux réseaux séparés auquel cas si l’étang est le Né, la source trouvée ne peut pas l’être…
En fait, tout le monde aura compris que l’intérêt de la ” recherche ” était plus bucolique et champêtre que scientifique.
Mais tout n’est pas perdu : en guise de découverte, ce baryton inconnu de moi m’a ” attrapé ” ! Tout pour me plaire : timbre cuivré avec juste ce qu’il faut de grain, émission aisée et naturelle dans tout le registre (à la différence de ceux qui sont obligés de hurler pour faire sortir les aigus dans d’atroces souffrances. J’exagère, c’est pour dire…). Schubert doit être content.
Alors… Mon cher Horus, je n’en attendais pas moins de vous. La précision scientifique d’abord. Effectivement la source ne peut être en contrebas sauf à être violemment aspirée par une bête subaquatique fantastique que nous n’avons point croisée, hélas. Donc, la source pouvait être dans l’étang et couler vers le petit ru où je trempai les mains ? Je vais en causer à l’explorateur-géographe et Né-en-moins ami. À défaut de doigts dans le Né, ce sera doigt dans l’œil et comme vous le dites, ça n’est pas grave : la promenade fut délicieuse.
Quant au jeune chanteur, j’avoue que j’étais ravie de ma trouvaille (en plus, il est joli !). Ravie qu’il vous plaise.
Mais oui belle découverte que ce baryton ! Trouvé deux comptines sur trois – presque les doigts dans le nez (en passant par la Lorraine et Les compagnons de la marjolaine) mais quel est la troisième ? Vous auriez pu mettre La Truite bien que dans le Ne pas certaine que l’on n’en trouve … Ou le morceau du bourdon de Rimsky-Korsakov. En tout cas belle balade que je vous envie un peu!
En fait, Véronique, je me suis un peu emballée pour les petites chansons ! J’avais en tête “En sortant de l’école, nous avons rencontré” mais cela ne colle pas. Donc tu as gagné. J’avais pensé à la Truite – quand on parle d’eau, on pense à Schubert, n’est-ce pas ? – mais me suis laissé “kidnapper” par le joli (et très bon) chanteur et cette ondoyante guitare. J’ai bien pensé à toi pendant l’exploration.
Ah ces R roulés, quel chanteur magnifique, et toutes les nuances dans Erlkönig (YTube). Une découverte merci. Je l’attends – ou au tournant – dans Mozart…
On dit que « Docteur Livingstone, I presume » est une invention romanesque, mais who cares ?
(OUI, au tournant)
Quand le roman embellit la réalité… Ce “I presume” ouvre tant de possibles. Le jeune Cicchillitti plaît beaucoup. Tant mieux. Je vais aussi aller écouter d’autres choses. Mais là, il m’épate (comme le nez, évidemment).
Qu’on soit bien d’accord : Cicchillitti est le guitariste, notre baryton se nomme Philippe Sly.
Mais voui !!! Que je suis tête en l’air. Ça m’arrange : plus facile à écrire et à prononcer. Merci, œil de larynx !
Avec tout le respect qui lui est dû, permettons nous de contester la contestation d’Horus. Car enfin le récit ne dit pas que la source nait en dessous du Né, cela nous l’avions deviné. Donc il n’est pas exact de dire que le ruisseau n’est pas le Né. N’est-ce pas ? En fait les explorateurs ont eu le nez fin, et soupçonné, ou raisonné, qu’il y avait un cours souterrain. Le Né est bien né là où la nécessité l’a voulu. Terminé.
Alors là… N’est pas né de la dernière pluie, le René ! Bravo pour ces nécessaires et non négligeables précisions. Nez mon… euh, non mais ! Signé : nénuphar.
Bel exercice d’enfumage, René ! Malheureusement, même en raisonnant avec ce que le récit NE DIT PAS, même en faisant intervenir ” la nécessité ” (trop fort !), on ne sait toujours pas où est la source du Né, objet de l’expédition…
Je n’arbitre pas. Je soumets à qui de droit.
De toute façon, le Né c’est comme le Nil. (en plus court)
Là on se rapproche de la vérité !
Euh, qu’est-ce qu’il disait le rené déjà ? Ah oui, le Né n’est pas le Nil… Vous m’embrouillez tous les deux.