Toutes les copines parlaient de leurs grands-parents. Davantage des grands-mères, d’ailleurs. Elles vivaient plus longtemps.
Ma grand-mère par-ci, ma grand-mère par là. Et toujours il y avait une grand-mère adorée et une grand-mère… euh, comment dire, pas très sympa. Je cherche dans ma mémoire mais ce schéma est récurrent. La bonne grand-mère et celle qu’on n’aime pas.
Moi, je n’ai pas eu des grands-parents. Enfin, si, bien sûr ! Sinon… Je veux dire que je ne les ai pas connus. Seul souvenir furtif, la mère de mon père, Manou, dans la cabine du Ville de Bordeaux qui nous emporte à Casablanca. Une grande et forte femme qui m’intimide. Je saurai pourquoi après.
Aujourd’hui, – depuis quelques années déjà ! – je suis grand-mère. De plus en plus parce que je vieillis. Je dis ça parce que les grands-mères des copines étaient toujours très vieilles. J’avais 52 ans quand ma petite-fille est née et, vu de maintenant, qu’est-ce que j’étais jeune !
Voici Antoine et Valentine, les parents de ma mère :
Le cadre est d’époque, c’est-à-dire vers 1900… Je ne sais absolument pas où et quand cette photographie a été faite. Valentine est morte de ” phtisie ” à Cambo en 1926, toute jeune.
Antoine l’a suivie de près. Ma mère était orpheline à 10 ans. Heureusement, elle avait une Mémé ! Très vieille bien sûr, et chérie. Et durant les bombardements sur Nîmes, il fallait que ma mère traverse la ville en courant pour aller mettre Mémé à l’abri : cette dernière était si sourde qu’elle n’entendait pas les sirènes !
Ma mère dans l’eau – dite Monette – et Mémé sur le sable, au Grau-du-Roi dans les années 30. Qui prend la photo ? Mystère !
Ma fille aura connu cette chance d’avoir une grand-mère adorée ! Elle ne peut parler de sa Mané sans que ses yeux s’emplissent de larmes.
Ma mère et elle ont vécu un amour sans faille. Qu’est-ce qu’elles ont ri ensemble ! Quels partages ! Clarisse fut, je pense, la raison de vivre de ma mère dans ses sombres dernières années. Et ma fille en prenait soin, la bichonnait, la bousculait un peu quand il fallait. Tant d’amour entre elles, tant de complicité… Et le premier immense chagrin quand la mort sépare.
Je n’ai connu ni cet amour ni ce chagrin. Je n’ai pas été petite-fille de… Mais j’en ai une ! Et c’est toute une histoire, cette tendresse-là. Récemment, nous sommes allées au cinéma voir Adieu les cons et nous sommes sorties de là dans le même état d’allégresse. Joie partagée. On se regardait et on rigolait !
Alors, la vignette musicale a toute une histoire, elle aussi ! Dans la version originale il est question de grand-ma… Je me suis dit ” chouette, c’est une histoire de grand-mère ! ” Pas du tout. Vous avez échappé à La mama, à Mamy Blue (plein d’interprétations sympas) … Vous avez gagné Iko iko, nombreuses versions dont une de Hugh Laurie épatante !
Ah, quel sujet Claire ! je suis intarissable sur la question des grand-mères ! mais comme disait Anne Sylvestre, “j’ai rien à dire ou alors trop”. Et quel “flair”, ou quelle intuition, car c’est sur mes grand-mères que je rassemble des documents et que j’ai commencé à écrire.
Je “savais” pourtant que mes parents avaient eu des mères hors normes, surtout ma mère élevée par ses grand-parents, qu’elle appelait papa et maman ; mais c’est bien tard que m’a sauté aux yeux, et au coeur, le rôle irremplaçable de toute grand-mère, même apparemment déficiente, même apparemment lointaine .C’est presque une thèse que je défends là.
Je suis grand-mère aussi ,de 3 garçons et d’une fille , avec qui j’ai une relation intense, qui a 23 ans; tous sont sujets de joies et de réflexion, de soucis également.
Je ne veux pas sombrer dans le “trop”, mais je te remercie particulièrement de ce billet dont toutes les allusions ont fait mouche .
Contente je suis ! Nous sommes d’une génération qui a connu des choses si différentes de nos aïeux, tu te rends compte que pour certain(e)s d’entre nous, les grands-mères ont connu 2 guerres mondiales ! Elles ne votaient pas. Ne choisissaient pas du tout quand être mère ! Ma grand-mère paternelle, l’artiste, a eu ses 3 fils hors mariage. Ma mère a connu 9 petits-enfants mais elle préféraient les filles (et surtout l’aînée de ma sœur et ma fille).
C’est une image très particulière sur l’échiquier familial mêmes si comme tu le dis, elles sont parfois mystérieuses et étranges, comme dans les contes, des figures tutélaires. Les parents de nos parents : quelle drôle d’histoire pour un enfant !
Quant à nous, quelle est notre place dans ces jeunes vies, dans cette époque si dure ? Dans tous les cas, une BELLE place, j’en suis sûre, la valeur refuge.
Vraiment ravie d’avoir participé de loin à ton travail d’écriture de mémoire : bravo ! J’espère pouvoir lire un jour…
Pour renchérir, l’une de mes grand-mères a épousé un lorrain qui s’est enfui de Lorraine , allemande après la guerre de 1870, pour faire son service du côté français ; elle portait donc un nom allemand ; elle a connu les 2 guerres: après chaque repas, elle clamait ” encore un que les Boches n’auront pas !”. Son mari a été gazé en 14-18 .
Mon autre grand-mère a aussi connu les 2 guerres, et a survécu à la grippe espagnole en 1918.Elle était “veuve de guerre” et mon père “pupille de la Nation”
Elles étaient solides ! J’espère , je crois, qu’un peu de leur force est passée en nous, comme le dit Anne Sylvestre, (encore elle), dans le “portrait de mes aïeules”.
Je suis de ton avis : nous sommes une valeur refuge .
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Bravo Claire ! Quel bel hommage… j’ai peu connu mes grands mères, un peu la maternelle, plus perverse que gentille… et n’ayant pas eu d’enfant j’étais destinée à ne pas être grand mère ! Je le suis pourtant, avec ma Salomé de cœur à défaut d’être de sang, et c’est une merveille de 14 ans que j’ai connue tout bébé… immense bonheur partagé. Et pour elle qui n’aura jamais connu ses deux « vraies » grand mères décédées avant sa naissance, je voudrais être cette mamieJo qu’on n’oublie pas…
Tu ne le seras pas, c’est évident ! La façon dont tu parles de cette jeune fille est plein de cette tendresse là.
Vous deviez – je crois à la prédestination – tisser ce lien, il existe. On l’entretient comme une maison qu’on aime.
Belle fin d’été à toi, Joëlle.
Je surveille, Claire, je veille aussi … Je demanderai des comptes 🙂
A vite