Trop fort Noam ! Et les charmantes petites fleurs bleues de mardi 8 sont bien loin…Mais le texte proposé ci-dessous est à “manipuler” avec précaution, : Chomsky n’aurait pas écrit ces Dix stratégies de manipulation des masses (voir la rectification à la fin), du moins sous cette forme. J’aime à penser qu’il en a conçu les grandes lignes ! Pour accompagner votre lecture, écoutez s’il vous plaît une musique de détente et relaxation, légèrement new age. On ne s’endort pas, on se concentre.
1/ La stratégie de la distraction : Élément primordial du contrôle social, la stratégie de la diversion consiste à détourner l’attention du public des problèmes importants et des mutations décidées par les élites politiques et économiques, grâce à un déluge continuel de distractions et d’informations insignifiantes. La stratégie de la diversion est également indispensable pour empêcher le public de s’intéresser aux connaissances essentielles, dans les domaines de la science, de l’économie, de la psychologie, de la neurobiologie, et de la cybernétique. « Garder l’attention du public distraite, loin des véritables problèmes sociaux, captivée par des sujets sans importance réelle. Garder le public occupé, occupé, occupé, sans aucun temps pour penser; de retour à la ferme avec les autres animaux. » Extrait de Armes silencieuses pour guerres tranquilles
2/ Créer des problèmes, puis offrir des solutions : Cette méthode est aussi appelée « problème-réaction-solution ». On crée d’abord un problème, une « situation » prévue pour susciter une certaine réaction du public, afin que celui-ci soit lui-même demandeur des mesures qu’on souhaite lui faire accepter. Par exemple: laisser se développer la violence urbaine, ou organiser des attentats sanglants, afin que le public soit demandeur de lois sécuritaires au détriment de la liberté. Ou encore : créer une crise économique pour faire accepter comme un mal nécessaire le recul des droits sociaux et le démantèlement des services publics.
3/ La stratégie de la dégradation : Pour faire accepter une mesure inacceptable, il suffit de l’appliquer progressivement, en « dégradé », sur une durée de 10 ans. C’est de cette façon que des conditions socio-économiques radicalement nouvelles (néolibéralisme) ont été imposées durant les années 1980 à 1990. Chômage massif, précarité, flexibilité, délocalisations, salaires n’assurant plus un revenu décent, autant de changements qui auraient provoqué une révolution s’ils avaient été appliqués brutalement.
4/ La stratégie du différé : Une autre façon de faire accepter une décision impopulaire est de la présenter comme « douloureuse mais nécessaire », en obtenant l’accord du public dans le présent pour une application dans le futur. Il est toujours plus facile d’accepter un sacrifice futur qu’un sacrifice immédiat. D’abord parce que l’effort n’est pas à fournir tout de suite. Ensuite parce que le public a toujours tendance à espérer naïvement que « tout ira mieux demain » et que le sacrifice demandé pourra être évité. Enfin, cela laisse du temps au public pour s’habituer à l’idée du changement et l’accepter avec résignation lorsque le moment sera venu.
5/ S’adresser au public comme à des enfants en bas-âge : La plupart des publicités destinées au grand-public utilisent un discours, des arguments, des personnages, et un ton particulièrement infantilisants, souvent proche du débilitant, comme si le spectateur était un enfant en bas-age ou un handicapé mental. Plus on cherchera à tromper le spectateur, plus on adoptera un ton infantilisant. Pourquoi ? « Si on s’adresse à une personne comme si elle était âgée de 12 ans, alors, en raison de la suggestibilité, elle aura, avec une certaine probabilité, une réponse ou une réaction aussi dénuée de sens critique que celles d’une personne de 12 ans ». Extrait de Armes silencieuses pour guerres tranquilles.
6/ Faire appel à l’émotionnel plutôt qu’à la réflexion : Faire appel à l’émotionnel est une technique classique pour court-circuiter l’analyse rationnelle, et donc le sens critique des individus. De plus, l’utilisation du registre émotionnel permet d’ouvrir la porte d’accès à l’inconscient pour y implanter des idées, des désirs, des peurs, des pulsions, ou des comportements…
7/ Maintenir le public dans l’ignorance et la bêtise : Faire en sorte que le public soit incapable de comprendre les technologies et les méthodes utilisées pour son contrôle et son esclavage. « La qualité de l’éducation donnée aux classes inférieures doit être la plus pauvre, de telle sorte que le fossé de l’ignorance qui isole les classes inférieures des classes supérieures soit et demeure incompréhensible par les classes inférieures. Extrait de Armes silencieuses pour guerres tranquilles
8/ Encourager le public à se complaire dans la médiocrité : Encourager le public à trouver « cool » le fait d’être bête, vulgaire, et inculte…
9/ Remplacer la révolte par la culpabilité : Faire croire à l’individu qu’il est seul responsable de son malheur, à cause de l’insuffisance de son intelligence, de ses capacités, ou de ses efforts. Ainsi, au lieu de se révolter contre le système économique, l’individu s’auto-dévalue et culpabilise, ce qui engendre un état dépressif dont l’un des effets est l’inhibition de l’action. Et sans action, pas de révolution !…
10/ Connaître les individus mieux qu’ils ne se connaissent eux-mêmes : Au cours des 50 dernières années, les progrès fulgurants de la science ont creusé un fossé croissant entre les connaissances du public et celles détenues et utilisées par les élites dirigeantes. Grâce à la biologie, la neurobiologie, et la psychologie appliquée, le « système » est parvenu à une connaissance avancée de l’être humain, à la fois physiquement et psychologiquement. Le système en est arrivé à mieux connaître l’individu moyen que celui-ci ne se connaît lui-même. Cela signifie que dans la majorité des cas, le système détient un plus grand contrôle et un plus grand pouvoir sur les individus que les individus eux-mêmes.
Rectification Jean Bricmont dit : […] Le 10ème principe reflète d’ailleurs bien les fantasmes, fréquents dans l’extrême gauche, sur la connaissance que le « système » aurait de l’individu moyen grâce à « la biologie, la neurobiologie, et la psychologie appliquée », ce qui est très différent de ce que pense Chomsky, qui sait que la connaissance (vraiment) scientifique de l’être humain est extrêmement limitée.
Comme ce texte me semblait être une simplification et une déformation de sa pensée, et que je ne trouvais pas son équivalent en anglais, je lui ai posé la question, pour en avoir le coeur net. Voici sa réponse : « Je n’ai aucune idée d’où cela vient. Je n’ai pas fait cette compilation moi-même, je ne l’ai pas écrite ni mise sur le web. Je suppose que celui qui l’a fait pourrait prétendre que ce sont des interprétations de ce que j’ai écrit ici ou là mais certainement pas sous cette forme ni en tant que liste. »
Quand même, c’était pas mal vu ! Faut en prendre et en laisser, notamment les points 1) du complot des media et 2) la connaissance avancée de l’être humain par le système. Eh bien voilà de quoi réfléchir…
Oui, Claire, on s’en sortira mais ça prendra du temps. En écho à Chomsky il faut lire Eric Hazan sur la langue de la cinquième République et son exploitation par les media. A lire aussi Michela
Marzano : Extension du domaine de la manipulation, de l’entreprise à la vie privée.
Je ne connaissais pas ce texte. Un bon résumé de ce qui nous arrive, dénoncé par des intellectuels de plus en plus nombreux, des philosophes et des sociologues notamment.
Crois-tu qu’on va s’en sortir ou bien est-on allé trop loin dans la dégradation de l’esprit critique ? Ce texte me flanque un peu la trouille parce qu’on y voit la force de ce discours
manipulateur et l’impuissance des intellectuels face à ce jeu de massacre de la pensée. Pessimisme ?
Sur cette musique : je ne connaissais que de nom ce style, dit de relaxation. Eh bien, franchement, je n’aime pas du tout, du tout. “La marée je l’ai dans le coeur…” quelle tristesse (je
trouve) de l’entendre ainsi, captive, et artificielle.
Pour abonder dans le sens de Denis sur le n° 1 de cette édifiante liste, cette petite citation : “Nous sommes reconnaissants au Washington Post, au New-York Times, Time
magazine, et d’autres grandes publications mondiales dont les directeurs ont assisté à nos réunions et respecté leurs promesses de discrétion depuis presque 40 ans. Il nous aurait été
impossible de développer nos plans pour le monde si nous avions été assujettis à l’opinion publique durant toutes ces années. Mais le monde est maintenant plus sophistiqué et préparé à entrer
dans un gouvernement mondial. La souveraineté supranationale d’une élite intellectuelle et de banquiers mondiaux est assurément préférable à l’autodétermination nationale pratiquée dans les
siècles passés.” David Rockefeller, Président et Fondateur du groupe de Bilderberg, et de la Commission Trilatérale, président du CFR (Central Foreighn Relations). Propos tenus à la réunion
du Groupe de Bilderberg à Baden Baden en 1991.
A voir également la vidéo d’un certain Edward Bernays, auteur en 1928 de Propaganda au sous-titre évocateur Comment manipuler l’opinion en démocratie sur le site
http://www.editions-zones.fr (dans le menu Bonus). C’est très instructif.
Bien d’accord pour la musique : c’était une petite “mise en condition ” pour ceux qui auraient besoin d’être accompagnés pendant la lecture de Chomsky !
IM-PRE-SSIO-NNANT les mots de Rockefeller, les mots sont précis et glacés ! Brrrrrr ! Écoute, tâchons d’ouvrir l’œil et le bon, sans trop d’illusions sur la résistance à opposer à tout ce
système. Mais quand même !
Je suis dans l’ensemble d’accord sur tous les points.
Tu hésites sur le 1) mais pas moi, j’ai tout de suite pensé au football. Au sport en général, à tous les jeux débiles (grattage, loto, jeux télévisés …). Les exemples sont particulièrement
nombreux.
Point 5) : le niveau des pubs a vraiment baissé ces dernières années, c’est un indicateur très intéressant sur la façon dont est considéré “le peuple” de nos jours.
Le point 9) pourrait expliquer pourquoi nous sommes, en France, les champions dans l’utilisation de psychotropes.
Le point 10) peut s’appliquer, peut-être, à la masse (psychologie des foules, psychologie sociale …), mais à mon avis, pas à l’individu isolé.
Bon, tout ça n’est pas bien gai, oui, nous sommes en permanence manipulés. Manipulés et de plus en plus censurés, ça c’est beaucoup plus grave.
Complètement d’accord pour la censure ! La manipulation, tu peux te défendre, lire Chomsky pa exemple et faire la part des choses quand les zigotos qui gouvernent causent… Mais la censure : tu
subis, tu gueules mais tu ne peux rien faire. Et ça, c’est effectivement catastrophique.
Bon, Denis, on s’accroche, on vit le moins mal possible, on contemple mimosas et tulipiers et on se chérit.
Ma première réaction “épidermique” quand il est question de Chomsky c’est de me dire “voilà encore le gourou des bobos qui pensent (euphémisme?) que, grâce à lui et à leur intelligence innée de
bobos bien-nés et cultivés, on-ne-la-leur-fera-pas, qu’ils vont dé-construire à tout-va la société, la publicité, le discours politique etc.”, puis je me dis”y a quand même de
bonnes choses là-dedans à conserver pour une hygiène de pensée équilibrée et saine, loin de la pensée unique, etc”… En tout cas, on est loin des petites fleurs bleues, dommage…
Gourou des bobos ? Tu es sûre ? Je trouve ce discours un peu subversif pour des bobos…Booooon, y-a-t-il un bobo en chacun de nous ? Je suis soulagée quand même que tu trouves de “bonnes
choses” là dedans, je le lis davantage comme un rappel à la vigilance. Pour les petites fleurs bleues, il y en aura d’autres, et même des roses, des jaunes et des multicolores !