On le sait pourtant, mais ça marche chaque année : cette saison émerveille. Même à un âge avancé, elle étonne. On croit que le jaune domine : colza, pissenlits, forsythia, coucous (petites primevères)… C’est parce qu’il chope l’œil.
Et puis, on voit bien que le blanc est présent malgré sa discrétion légendaire. Quoique… Le blanc éclate surtout s’il est posé sur des branches noires. Et pour le blanc encore, petit clin d’œil à mon amie musicale : vu la première Dame de onze heures (ornithogale en ombelle).
Des bourgeons sont rosés, des pâquerettes débutantes sont cramoisies, je ne parle pas du vert qui fait son fier et se pousse du col. On en mangerait. Même les verdiers sont de sortie.
Vient le bleu, l’humble et doux de la petite véronique, celui des muscaris éclairé par du rose, celui des pervenches, triomphant.
Pour le rouge, hormis les jolis petites taches sur le pic épeiche qui mitraille à tout va, il faudra attendre.
Le ciel n’hésite pas non plus : certes du bleu, mais des trains de nuages blancs ourlés d’or passent très loin. On ne les entend pas. Ou bien, une belle masse anthracite menace et l’on sait l’averse proche. Des ciels de peintre.
Reverdie, dis-je toujours, prononçant là le nom d’un poète aimé. Mais aussi le nom d’un genre poétique au Moyen-Âge. Et aussi le nom d’un groupe de musique : impossible de résister, même si cela parle de sumer.
Le soir vient ; les arbres brodent leur dentelle sur fond de ciel. Les feuilles viendront bientôt. Lorsque la nuit est tout à fait là, la fantastique Orion exhibe Beltégeuse, la super géante rouge, Rigel, la super géante bleue et dessous, sa nébuleuse : c’est si beau, si éclatant qu’on comprend pourquoi toutes les anciennes civilisations posaient des noms de dieux sur ces objets célestes. (Merci à notre super et enthousiaste connaisseur d’étoiles).
Mon vœu ? Que cet émerveillement perdure !