Se souvenir de Bernard Noël parlant – entre autres choses – des lavis de Zao Wou Ki. Sa façon de tenir le pinceau à poing fermé. Pur moment. L’expérience des lavis de Bernard Noël : toujours un visage se dessinait… De sa voix douce et lointaine, il a dit bien d’autres choses qui ressemblent aux lavis : du précis dans la brume, du définitif dans l’indéfini.*1

Dire que les insomnies ont du bon : elles permettent des sortes d’indiscrétion puisque certains moments ne devraient pas être sus, vus, vécus. C’est du clandestin. Ils devraient avoir lieu sans nous, sans notre regard sur eux. Silencieux et furtifs. On a l’impression de voler du temps au temps, comme on vole un fruit, une lune au ciel. Ça rend joyeux.
Dire aux mimosas d’attendre ! Franchement, est-ce bien raisonnable de pointer déjà leur minois jaune alors que les gelées arrivent ? Il est urgent de patienter. Il faisait bien froid il y a quelques jours et ça ne fait que commencer et c’est bien. Voir le début de promenade avec ce figuier philosophe qui en a pris son parti : il attend que ça passe.
Me délecter de ces six lignes de Brautigan *2, envoyées par ma très chère M. D., photo du livre plié comme des ailes de papillon :
L’Haleine du papillon
La lune projette
Une ombre sur la nuit.
L’ombre est aussi silencieuse
Que la naissance d’une rose,
Et l’ombre est aussi douce
Que l’haleine du papillon
Et pour le passé, le présent et le futur, tous jazzy : le météore !
*1 Galerie Première Ligne à Bordeaux : Les Chosines de Bernard Noël
*2 C’est tout ce que j’ai à déclarer – Œuvre poétique complète – Richard Brautigan – Le Castor Astral, 2016 éd. bilingue
Me semble bien que B. Noël conçoit ses dessins au masculin… “les chosins”, dit-il !
Et ce figuier, si patient sous le givre : ainsi, parviendra-t-il au bout de l’hiver.
Bravo pour le recueil annoncé par C.O dans sa lettre de voeux : c’est le début d’une nouvelle histoire.
C’est bien de moi de tout “féminiser” ainsi ! Tu as raison, je pense. Et oui, le figuier tiendra : c’est un vieillard solide et l’été, il est magnifique : dans cette promenade, c’est lui que je vois en premier et il est comme le veilleur du parc, son gardien. Même nu et gelé, il est majestueux.
Le recueil mijote, j’en suis – tu t’en doutes – toute ravie ! (tu as l’œil quand même !)