Pourquoi se méfier de ce mot ? Parce que comme tous ces mots en -ION, recouvrant tant de champs, on lui fait dire le pire et le meilleur. Parce que derrière son air bonhomme et paternaliste, rassurant en quelque sorte, de sombres imbécillités trouvent refuge.
” La tradition – [donner à travers le temps] – serait de l’ancien persistant dans du nouveau. ” *1 Ah, elle me plaît bien cette phrase !
Parfois, le mots traditionnel est accolé à un autre : L’étiquette « traditionnel » appliquée à des objets, des arts, des récits, des cérémonies, des rites de politesse, des croyances ou des recettes de cuisine, a le pouvoir de jeter un voile sur leur passé et de les instituer comme symboles auxquels s’identifier. *2
On a tous, je pense, un chant traditionnel en mémoire. Cela devient du folklore. Les chants de Noël par exemple… Tiens, le repas de Noël, vous savez cette réunion de famille où tout le monde s’engueule, c’est une tradition que même les incroyants pratiquent.
La religion est championne en matière de traditions. Jusqu’à cette fameuse Fête des fous où l’on peut tout transgresser ! On joue aux dés et on boit dans l’église, on se travestit, on détourne les chants liturgiques : la foire totale ! Ça détend. (Souvenir de René Clemencic et son Consort à Bazas avec l’amie Laure : quel régal, ce concert !)
Voyons… chez nos voisins lointains : au hasard, le Japon. Seppuku, suicide honorable et en public. Très ancienne tradition consistant à se suicider en s’ouvrant le ventre. En général, les copains du samouraï ou du général se croyaient obligés d’en faire autant. Quand la solidarité est aussi une tradition.
Je passe vite sur les massacres de Féroé, Yulin… Rien que les noms me font vomir ! TRADITION, on vous dit !
Plus près de nous, en Espagne, le lancer de chèvre du haut d’un clocher a perduré jusque dans les années 2000 ! OUI, le lancer de chèvre ! Je n’illustre pas !
Et je ne parle pas que de celles où les animaux paient un lourd tribut. Tout de suite après, viennent les femmes ! Il faut lire jusqu’où peut mener le tabou des règles… C’est aujourd’hui.
Tout ça pour en venir aux mots de Monsieur Julien Denormandie, Ministre de l’agriculture sur la chasse à la glu : ” On est un pays rempli de traditions. On ne nous l’enlèvera pas “. D’abord, il cause mal, ce monsieur ; ensuite, peut-être faut-il lui rappeler que les Anglais – qui ont aussi beaucoup de traditions – ont abandonné la chasse à courre !
Voilà, certaines traditions ont disparu et tant mieux ! Que vienne le temps où celles qui satisfont – pour une raison totalement irrecevable, le plaisir de tuer – un petit nombre soient totalement abolies : c’est un souhait très fort.
Un oiseau bien vivant et une chanson très rigolote pour finir légèrement.
* 1 Lenclud G., 1987, « La tradition n’est plus ce qu’elle était… Sur la notion de “tradition” et de “société traditionnelle” en ethnologie », Terrain, n° 9, pp. 110-123.
* 2 Article non signé. Sciences Humaines H.S. n°36 Mars-Mai 2002
Sujet délicat.
Comme toujours, il y en a des bonnes et des mauvaises.
Certaines transportent peut-être une partie de notre histoire ? Nos fondements.
Bon, j’ai surtout à l’esprit des mauvaises traditions ou des insignifiantes, ou des carrément casse-pieds.
C’est compliqué tout ça, je suis un peu sec sur le sujet.
En fait, j’ai écris pour te faire coucou.
Le sujet est vaste et complexe ! On n’est pas ” sec ” sur le sujet, c’est le genre ” vous avez quatre heures ” avec intro, thèse, antithèse, synthèse, conclu…
Oui, sans doute, certaines véhiculent de vieilles coutumes qu’il est bon de conserver. Les crêpes de la Chandeleur (qui se souvient de ce rituel ? Je t’en parle parce que j’ai souvenir de crêpes collées au plafond !), se serrer la main (surtout par les temps qui courent !), trinquer etc…
Mais comme toi, ce sont surtout les coutumes idiotes ou cruelles qui l’emportent.
Quant à ” faire coucou “, c’est tout une histoire ! Je te la raconterai… Merci, Denis.
… genre “je dis que je vais le dire, je dis que je le dis, je dis que je l’ai dit”.
Bon, de part notre “terroir” natal, nous n’avons pas été éduqués entourés de traditions, comme peuvent l’être les Basques, les Bretons, etc… donc me concernant, je les trouve toujours étranges, bizarres, voir souvent archaïques, j’ose, parfois rigolotes.
Ha ! les crêpes collées au plafond, quel délice rigolatoire.
Je vois que tu as retenu la formule magique de maman !
C’est vrai que le ” régionalisme ” génère de la tradition. Tous les gens ” ancrés ” autour de moi ont baigné là-dedans. Enfin, jusqu’à notre génération parce qu’après… Celle que je déteste le plus, je crois, c’est le Carnaval ! Selon les régions, c’est laid à faire peur. Peut-être le but recherché ?
Tu sais que j’en ris encore de nos frisbees lactés ?
Bien vue et dénotée toute cette entreprise talismanique autour de la seule incantation “tradition” :
un ordi Tradi-Internet? Une hanche En Avant Tradition? Des petits enfant Tradition-Garantie? Priez pour nous…
Plus sérieusement, quel est le nom du peintre qui peint si vivante cette nature (morte) ?
Et les ” tradis ” de Saint-Cyr (catho fâchos miso et tout le saint frusquin) ! Tu connais ?
Honte sur moi (d’autant que… je ne l’ai pas retrouvé seule) pour le nom du peintre ! Il s’agit de Alexandre-François Desportes (1661 – 1743), très connu pour ses scènes de chasses et ses natures mortes. Sais-tu que le titre de ce tableau est Still life of Dead Game with Hounds ? Tout est intéressant dans ce titre.
Pour les néophytes, les Hounds sont des chiens de chasse, en meute. Le verbe, lui, veut également dire ” Harceler “.
” tradis ” de Saint-Cyr, je ne connaissais pas ou j’avais oublié car j’ai dans ma jeunesse côtoyé de très près ce genre ras du calot… Mais “privé” de filles à martyriser, ce qui désamorçait, en partie, leur c*nn*rie.
Et merci pour le décryptage du titre “Still life of Dead Game with Hounds” (que je pensais être une traduction du titre original en français que je n’arrivais pas à trouver), c’est la Desportes ouverte à l’ironie, non?
Ah oui, c’est vrai que tu as été amené à subir ces bizutages raffinés ! Mais rien à voir, sans les filles, les nègres et les pédés : pardon, mais c’est à ce niveau que ça vole ! (Et puis j’ai pu placer NÈGRE, na !). Il y a peut-être des trucs marrants dans les rites de passage mais en général, c’est très cruel et affligeant de bêtise.
Oui, j’ai trouvé vraiment ce télescopage de mots, anglais de surcroît, vraiment étonnant : j’aimerais savoir le pourquoi du comment. En français, ça ne donne rien qu’un gloubi-boulga ! En anglais, le titre d’un roman d’horreur.
[…] ces bizutages raffinés ! Mais rien à voir, sans les filles, les nègres et les pédés : pardon, mais c’est à ce niveau que ça vole !
Peu de bizutage “horrible”, j’ai eu de la chance. Et d’accord plein pot concernant les cibles par défaut qui excitent les mous de la tête, hélas.
En fait c’est juste la notion de groupe, le mien, qui donne au petit rien à un coup cette illusion de vérité à défendre et force lâcheté.
Il y a peut-être des trucs marrants dans les rites de passage mais en général, c’est très cruel et affligeant de bêtise.
Le bizutage n’est qu’humiliation sans connaissance. Un véritable rite de passage est le corps agrandi d’une peur nouvelle. Démontage, un étage. J’ai le souvenir ado d’une nuit seul en forêt, au matin le peureux avait appris qu’il vivrait en location…
Bon tout cela nous éloigne de l’essentiel : le gloubi-boulga. Quand la gastronomie française essaie de chanter en anglais : un ragout d’horreur !?