23 mai. Je suis en retard. Je le savais pourtant… J’ai raté un tram puis il a stoppé pour cause de « cortège ». (Cortège, je vois toujours du tulle blanc, une mariée et de demoiselles d’honneur : ah les représentations !). Justement, c’était un de mes rendez-vous. Docile -ai-je le choix ? – je descends du tram et rejoins à pied le « cortège ». Beaucoup, beaucoup d’uniformes et de véhicules blancs et bleus.
Lors de ma marche, je suis happée par des images surréalistes : dans ce jardin du centre ville, de grandes toiles dont une partie découpée crée une porte sont tendues, succession de paysages emboîtés.
C’est étrange et assez beau. J’aime beaucoup ces deux-là, en perspective :
On passe des arbres aux corps, lesquels ne savent plus trop où ils en sont. Le parcours sera aussi mouvementé que le « cortège ».
Je marche un moment avec ce dernier puis le quitte et vais à mon deuxième rendez-vous non sans avoir croisé une maison fleurie. J’arrive dans un lieu superbe très arboré aussi. Une belle salle où un musicien (violoncelliste) fait travailler un jeune quatuor à cordes. Lui, c’est Alain Meunier, ma musique c’est le n°8 de Beethoven. Quand elles jouent, on sent une légère raideur ; c’est bien mais un peu mécanique. Tout est à sa place, presque trop. Alors, avec des gestes, des petits bruits de bouche, des mots dans toutes les langues, il dit : mais là, vous, qu’avez-vous envie d’entendre ?
Je reste pour le deuxième ensemble, c’est passionnant parce que l’oreille s’aiguise, on entend de mieux en mieux, on écoute de plus en plus finement. C’est Mozart le n° 19 , Dissonance. Donc il faudra que ce soit juste même quand c’est faux, il faudra que ce soit justement faux.
Il dit : jouez ensemble, oui, bien sûr, mais ENSEMBLE, les uns avec les autres, écoutez vous. Et on reprend, telle mesure, l’entrée du violoncelle à la suite du premier violon. Il explique le sens du mot Adagio, il leur dit Soyez tranquilles. Ça travaille, les indications sont reçues, comprises, exécutées. L’archet tiré ou poussé, la petite respiration comme une virgule avant la phrase suivante.
Faut être fada pour reprendre 6 fois la même mesure, pour comprendre ce qui doit changer mais ça bouge. C’est de plus en plus beau. Tout le monde le sait, le sent, l’entend. Ça marche !
Quand il entend ce qu’il voulait, ce qu’il fallait que ce soit, il dit : voilà, c’est bien. Et les jeunes sourient. Moi aussi.
Dans la salle de l’atelier, il y a cette affiche, photo de Simon Buchou avec, de dos, mes chouchoutes : le quatuor Akilone dont j’ai déjà parlé.
Je pars, pleine de cortèges… les copains de la manif, les notes de Beethoven et Mozart, les jeunes qui en une heure ont avancé de mille lieues. Merci la vie.
Deux P.S. que je mets avant la musique :
– L’atelier du 25 mai avec Luc-Marie AGUERA faisant travailler le quatuor TCHALIK (retenez ce nom) était fantastique !
– L’image de Une n’est pas celle que je voulais mais j’ai des problèmes techniques ainsi, je crois, que pour la mise en page de mon billet. Tant pis, je fonce !