On avance dans le temps, on suit la chronologie, maintenant on est sages. Pas comme dans l’original * où le désordre règne. Les mois y jouent à saute-mouton : le calendrier était conçu (vécu ?) dans une perte totale des repères. Mais c’est ainsi dans la vie parfois : l’été se présente au beau milieu de l’hiver. L’inverse est également possible quoique plus rare. Et, il me semble le printemps est permanent pendant la jeunesse.
Autrefois, j’aimais ce mois de décembre parce que l’enfance y étincelait et nous éclaboussait de lumière et de rires. Autrefois…
Exceptionnellement, de la musique, avant le texte. Vous pouvez l’écouter en lisant Décembre… ou pas. Vous faites ce que vous voulez. Vous êtes chez vous. Il neige dans nos têtes.
DÉCEMBRE
Encore plus loin, décembre enfoui, il faisait nuit à cinq heures. Dehors, les enfants baladaient leur monde dans le noisetier. De la fenêtre de ma chambre, voyeuse, je suivais leurs jeux denses, tranquillisée par leur enfance si vraie, vécue vaille que vaille. Dans l’arbre univers, leurs petits corps vigoureux se suivaient, se frottaient à l’écorce et à l’air froid.
Bleu du froid vespéral, étourneaux inconnus en grappe éclatée avec l’illusion du familier.
Connaître enfin la familiarité tandis qu’à l’imprévu nous nous rendons.
J’ai cicatrisé de navrants abandons ; il m’en vint, éperdument balancée sur le fléau des matins, d’acides rires, de cinglantes colères.
Dans le guet irraisonné des bateaux de la joie, c’est un déclin qui roula sur mes joues.
L’extase de musiques miraculeuses brisa silencieusement les amarres.
Je n’en attendais pas davantage, je fus violence.
* Le Calendrier oublié in L’Aveu des nuits – Éditions des Vanneaux, 2017 (L’Ombellie)