Ce matin, j’entends Misia – à propos de la sortie de son album Para Amalia – dire d’Amalia Rodrigues qu’elle dessine avec sa voix. Et je vois tout de suite ce dont elle parle.
J’ai vu et entendu Misia en 2000, du temps qu’elle chantait les grands écrivains portugais : Fernando Pessoa, Agustina Bessa Luis, Jose Saramago, Lidia Jorge, Antonio Lobo Antunes, Sergio Godinho… Elle dit aussi d’Amalia qu’elle a toute la saudade du monde. Si Misia le dit…
Et de la barque noire d’Amalia Rodrigues, je suis passée à une autre, plus mystérieuse encore :
On serait dans une barque, ça tanguerait un peu, doux balancement, le temps serait flottant lui aussi. Et puis très vite, une inquiétude affleurerait, peur qui se transforme en colère, comme souvent avec Schumann, comme avec tout le monde. Le balancement maternel reprendra plus tard mais il nous amènera en une marche inéluctable vers un apaisement final. C’est ainsi avec Schumann, on va toujours vers ce destin dessiné comme avec la voix d’Amalia, déguisé en douceur. Peut-être parce que la mort parfois a la douceur de l’eau. Et inversement.
Sauf avec Melina… bien qu’elle soit folle, folle d’attendre le retour encore. S’ils sont noirs au Portugal, les bateaux sont blancs en Grèce. Et partout la nave va et nous embarque.