Je pense avoir déjà parlé de ça, tant pis si je respiape (radote, si vous préférez) ! Parce qu’en ce moment, je trouve qu « ils » font fort ! Les marchands de bonheur sont plus collants que les démarcheurs de téléphonie. Plein d’émissions télé, des films, des livres, on nage en pleine euphorie que l’on – qu’ils – voudrai(en)t perpétuelle.
Ben oui, parce qu’un heureux consomme ! Cherchez pas plus loin. La culture du positif, c’est bon pour l’économie. Cette positive attitude – non, je ne mettrai pas l’italique ! – aide à bien s’intègrer et en plus c’est bon pour la machine à sous.
Il y a un certain temps déjà que cette injonction, car c’en est une, nous cerne, nous enrobe, nous rattrape et nous tabasse : c’est une véritable sacralisation du bonheur ici-bas, un terrorisme de la béatitude ! SOYEZ HEUREUX, c’est un ordre.
Une raison à cela : la souffrance dérange. Et ceux qui n’arrivent pas à être heureux sont gênants et gênés : J’y arrive pas… C’est de ma faute… Ch’uis nulle ! Et les autres en face, les bons élèves qui ont le bon coach et de la VOLONTÉ de chantonner : ils font pas d’efforts, m… pourraient y mettre un peu du leur, quand même. Un bon coach (!) et le tour est joué.
Des théories sur le bonheur, des spécialistes du bonheur voire des experts, des exercices de bonheur et, surtout surtout, des RÉSULTATS.
Marguerite Duras qui a écrit La Douleur mais sait se marrer et être drôle dit :
C’est un mot, ça, le bonheur, qu’on ne devrait jamais prononcer. Le sens même que nous donnons au mot en serait comme dévoyé et il en verrait sa portée outrepassée : innaccessible, extraordinairement mystérieuse.*
Mais, nom d’un petit bonhomme, depuis quand le bonheur est-il un état stable et durable ? Comme la vie, en quelque sorte.
*Marguerite Duras, La Passion suspendue – entretiens avec L. Palotta della Torre, Seuil, 2013