Petit objet vital, carnet à spirale ou pas qui en dit long long long sur notre vie. Ça raconte, un répertoire. Pas celui qui est près du téléphone pour les gens organisés. Non, celui qu’on trimballe dans le sac au cazoù : pour envoyer des cartes postales quand on voyage, pour noter la nouvelle adresse d’un ami retrouvé, d’un ami tout frais fait. Avec parfois de post-it qui dépassent, se décollent et tombent. Ça fait trace. Ça fait mémoire.
Avec les téléphones portables, on a une autre mémoire, la mémoire électronique des numéros de téléphone. Dans la petite boîte noire – ou en couleurs – qui parle et qui écoute il y a nos » contacts « . Mais ça ne raconte rien un répertoire de téléphone. Rien ne remplace le carnet d’adresses écrit à la main et moi, je mets un S à adresse.
Vingt fois, j’ai essayé d’en commencer un nouveau… Parce que le mien n’a plus aucune allure. Vingt fois, je me suis arrêtée à la lettre B. Je ne peux pas abandonner le tout petit carnet, avec ses onglets complètement usés pour les lettres où il y a beaucoup de monde (le M pour moi), ses adresses uniquement écrites au crayon pour pouvoir effacer quand il y a des changements, celles des gens oubliés, (qui c’est celle-là déjà ?) celles des absentés que l’on n’efface ni ne barre parce que c’est tout simplement impossible.
La petite joie un peu idiote d’avoir des gens inscrits à la lettre Z ou W parce que ça, c’est rare… J’ai deux Z et un W mais là, je triche parce que c’est son nom de jeune fille. Je n’ai pas de X ni de Y.
Je connais quelqu’un qui a perdu son carnet d’adresses et cette perte en était vraiment une, une perte de repères, un vertige sans filet… Comme si , avec le carnet, tout le monde avait disparu. Un truc très perturbant.
Moi je pars et je l’emporte, bien sûr. J’espère qu’il y a de jolis timbres à London.
Ah oui… pour finir, une petite phrase de Boris Vian : » Pourquoi je vis ? Parce que c’est joli. «