A. S. : billet en deux parties pour cette danse parce qu’elle le vaut bien
Il y a longtemps, j’ai écrit sur tout ce que j’aurais aimé mais ne saurai, ne pourrai jamais faire : plonger, faire des origamis, jouer de l’accordéon. Mais mon plus grand regret, c’est le TANGO !
Deux films très aimés ravivent ce regret, ce désir de bouger si parfaitement à deux :
Danser le tango est une démarche hypnotique
Où l’un devient l’autre, l’espace d’un instant
Où enfin l’on danse, comme spirituellement,
Au moment du départ, sur le mouchoir de l’adieu.
Horacio Ferrer – Paul Garello
Le premier de ces deux films est le trop méconnu L’acrobate de Danie-Jean Bollet (1976) avec l’irremplaçable Claude Melki, en garçon de bains-douches et… danseur de tango énamouré. L’autre film, c’est le très joli Je ne suis pas là pour être aimé de Jean-Claude Brizé (2005) avec Patrick Chesnais et la délicieuse Anne Consigny.
La belle phrase de Ernesto Sabato “Le tango est une pensée triste qui se danse” est souvent attribuée à Jorge Luis Borges, lequel a écrit sur le tango – il a même écrit des paroles pour des tangos – mais préférait la milonga. C’est grâce à lui que j’apprends que le tango a des racines noires.
La milonga, possible ancêtre du tango, celle qu’aimait tant Borges, quelle histoire, quel mescla ! À la fois, lieu mal famé des faubourgs où se côtoient anciens gauchos et anciens esclaves, où viennent s’encanailler les fils de bourgeois, où se mélangent habanera, candombe, polka, valse et canzone italienne, où les instruments les plus divers se succèdent pour arriver au bandonéon et au piano et… où les couteaux volent !
Mais pour en revenir aux racines noires du tango, je laisse Dom Pedro le réalisateur de l’excellent documentaire Tango Negro, aidé par l’artiste-musicien et historien argentin Juan Carlos Caceres, nous expliquer l’histoire :
Dans les années 1880, après l’arrivée du nouveau pouvoir, l’Argentine a décidé de changer sa politique vis-à-vis des Noirs. C’est une période qui a été très difficile pour les Noirs, qui n’avaient plus droit à la parole. Ils ont été bannis de tous les mouvements culturels, car l’objectif du nouveau pouvoir était de blanchir l’Argentine. Or en 1840, la ville de Buenos Aires était peuplée de 40% de Noirs. À cette période, beaucoup de Noirs, qui étaient encore pour la plupart des esclaves, servaient aussi de chair à canon pour la libération du pays. L’objectif du pouvoir était surtout d’amoindrir la présence des Noirs pour blanchir le pays et vivre comme les Européens. L’Argentine a même adopté la langue espagnole au 20ème siècle pour atteindre son objectif.
À suivre… En attendant :
oh mais que j’aime la video où deux hommes tangottent. Merci ! Sans ce côté horripilant des hommes machos et de leur danseuse-fatale, talons aiguilles et jupe ouverte jusqu’au nombril.
Et puis il y a Carlos Gardel…
C’est fantastique ! Ils sont si beaux, d’une élégance TOTALE. Ah suis contente !
Veronica Palacios : toute la danse quasi écroulée contre lui, il la retient juste assez pour qu’elle puisse le suivre. A la fois torride et retenu.
Ce qu’on appelle peut-être la bonne distance ? Qui en dit plus sur l’osmose des esprits que des corps, ceux-ci s’effleurant DANS la musique ?
J’adore Claire, le tango. Borges, la milonga,… J’attends la suite et en attendant vais vite revoir tango negro
C’est vrai ? Ahhhhh tant mieux. Borges m’accompagne depuis très longtemps. Quant à ces musiques qui parlent directement au corps, qui font parler les corps, elles génèrent une sorte de transe jubilatoire. Heureuse de partager ça avec toi.
Et n’oublions pas l’inénarrable Cumparsita à l’œillet de ” Certains l’aime chaud ” (Daphnée, c’est encore vous qui conduisez…). Justement, pour les deux garçons frères, il n’y a pas de conducteur, ils sont parfaitement symétriques. Ici, pas de séduction mais du défi. Avec la femme, le couple est formé, comme soudé et tous les moyens sont bons pour séduire, y compris, et surtout, les plus périlleux mais toujours en suivant la musique : accélération /ralentissement, enjambée/petits pas répétés autant de fois que le dit le bandonéon. À l’envolée des violons, les corps parcourent la piste mais seules les jambes s’expriment.
Torride, assurément et, tout-à-fait d’accord, la jupe fendue est un pléonasme inutile, même si elle facilite certaines figures.
PS. Le premier clip m’a échappé, trop espagnol pour moi.
Le dernier est… russe même si les danseurs sont plus latins que slaves. Les Russes sont paraît-il fous de tango. Vous imaginez Poutine dansant le tango ?
J’avais oublié l’inénarrable Daphnée ! Pourtant, ce qu’elle a pu nous faire rire avec ses maracas ! D’accord sur tout, Horus, vos remarques sont comme toujours très pertinentes. Un regret : que l’admirable langue de Borgès vous échappe, c’est une grande perte. Et NON, je n’imagine pas du tout Poutine dansant le tango quoique avec lui… Tous les scandinaves adorent aussi le tango. Et même les asiatiques. En fait tout le monde aime le tango !
Pardonnez la digression, à suivre la belle prose de Monsieur Horus, “Some like it hot” s’est imposé au programme de la semaine (juste à portée de DVD; les classiques se doivent d’être à la maison). Bien sûr la scène n’est pas tango (https://www.youtube.com/watch?v=4-qdvZDua9k) mais sa caricature n’échappe pas à la sensualité du genre, bien au contraire. Car plus vrai(e) quand surjoué(e).
Te pardonner ? Mais plutôt te remercier 1000 fois : j’en pleure encore de rire ! Daphnée, la reine du tango et des maracas. Indispensable.
J’en connais deux qui vont être contents (Horus et Clarisse). Et moi tiens, j’y retourne, tsoin tsoin !