Les japonais disent comme ça : gifto. C’est gift japonisé. ギフト ou gifuto. C’est un cadeau. Ils en connaissent l’art qui commence dès l’emballage. C’est si beau qu’on ne peut le défaire. D’ailleurs, on n’ouvre pas devant celui qui offre : cela pourrait le gêner car il décèlerait votre émotion ou… votre déception. L’emballage déjà dit la pudeur. Il a un nom – furoshiki – et diffère selon l’objet emballé. Il n’est pas le même selon le cadeau, la circonstance, le moment. Selon leur nature, les présents ont des noms différents. Présent, en voilà un joli mot !

Le Gifto de l’ami arrive dans son petit carton couvert de vermicelles-vermisseaux (l’écriture japonaise m’y fait toujours penser). Il faut l’ouvrir patiemment et s’obliger à aller doucement dans la découverte de ce qu’il contient. Les gestes doivent être accordés à l’objet : lenteur, délicatesse et concentration. Présent à ce que l’on défait comme fut présent celui qui fit.
Et commence l’émerveillement : une carte somptueuse, des photos dans leurs petites pochettes en cellophane, des petits trucs à grignoter, des petits tissus avec des imprimés d’une rare élégance… Je n’en finis plus, je vais de joie en joie.
[Photo de Une, MON emballage de MON gifto.]
Je change de sujet mais au fond, on reste dans les cadeaux. Aujourd’hui, j’ai besoin de ces joies. En 1967, un ami m’offre un disque rapporté des États-Unis : je l’ai écouté tous les jours pendant des lustres. Il y avait Suzanne, Sisters of mercy et d’autres morceaux. The Partisan n’y figurait pas mais par les temps qui courent…
Et aujourd’hui, le cadeau, ce sont ces deux voix angéliques. On écoute les paroles et on se dit : Bien sûr que non, ce n’était pas notre souhait que tu te taises, on t’aurait écouté encore et encore…
http://www.dailymotion.com/video/x2rbd9k
Excusez ce billet un peu désordre. Je suis moi-même en désordre, chamboulée par les mêmes choses que vous, sans doute. De plus Leonard Cohen a eu un maître zen japonais, Roshi. Alors, les cadeaux, Cohen zen, le Japon… finalement : le fil ténu de l’émotion.
merci pour ton gifto et ses petites douceurs. Marie-Paule
C’est………..Beau !
Cool, ce petit billet bien enveloppé, tout grand à l’intérieur. Avec de vrais morceaux de japonais, cadeau ! 😉
Barthes (L’ Empire des signes), qui a si tout bien senti, à propos du paquet japonais :
[…] il n’est plus l’accessoire passager de l’objet transporté, mais devient lui-même objet ; l’enveloppe, en soi, est consacrée comme chose précieuse, quoique gratuite ; le paquet est une pensée. […]
Puis notre auteur chanteur, aux mots préférés (excellents ces video extraits, merci), tristesse en cet écho qui s’éloigne, pour durer.
Saluons en souriant, cette intro d’une de ces chansons, Tower Of Song, au Sydney Opera House en décembre 2013 (sur Spotify, en souhaitant que certains puissent l’entendre) :
https://open.spotify.com/track/5OHOSUcI8zlSxgWzu2nNQR
Sinon en prise directe depuis la salle (son médiocre) :
http://cohencentric.com/2015/03/17/video-transcript-leonard-cohen-explains-stages-of-a-mans-allure-to-women-sydney-dec-2-2013/
Et sa transcription :
“Y’know I was talking with some of the guys . . . some of the guys in the band are kind of over the hill. And they were talking about the various stages that a man goes through in relation to his allure to the opposite sex. It was not a scientific evaluation . . . just something that arose over a cup of coffee.
It went something like this: You start off irresistible. And, then you become resistible. And then you become transparent – not exactly invisible but as if you are seen through old plastic. Then you actually do become invisible. And then — and this is the most amazing transformation — you become repulsive. But that’s not the end of the story. After repulsive then you become cute – and that’s where I am.”
Conclusion, Marianne Faithfull, qui dit ce qu’on veut dire :
“Je n’ai jamais eu le courage de lui avouer que je désire qu’il écrive un texte pour moi. Il apparaît comme une statue intouchable. Puis on se retrouve à pleurer en écoutant He’s a lazy bastard living in a suit… Et, bien qu’on n’ait toujours rien compris à ses vers, sur lesquels on peut méditer toute une vie, il nous tend la main et on se sent chez soi.”
(source : http://www.lexpress.fr/culture/musique/leonard-cohen-est-mort-quatre-femmes-de-sa-vie-se-souviennent_1849554.html?xtor=ES-5001-%5Balgo-actifs%5D&_ope=eyJndWlkIjoiMjA5NjE2MyJ9)
Ça c’est du commentaire ! Un beau gifto aussi ! Et puis bon sang mais c’est bien sûr, BARTHES et son paquet-pensée… Quant à COHEN un immense どうもありがとうございます (domo arigato etc. un immense merci) pour ces liens : j’ai fait des découvertes merveilleuses. Comme Marianne, je ne comprends pas tout – loin s’en faut – mais rien que la voix embarque. J’aime ce type depuis longtemps et pour toujours. Tant pis pour lui, il ne l’a pas su (quoi ! la fan et la midinette sont très rares chez moi mais quand j’y vais, c’est à fond !). Comme avec d’autres hommes (je pense à Laurent Terzieff), cette impression d’intimité, il me parle à moi, même s’il ne le sait pas. Est-ce que les hommes ont cette sensation ?
“Cette impression d’intimité, il me parle à moi, même s’il ne le sait pas. Est-ce que les hommes ont cette sensation ?”
Les autres sais pas, moi oui. Il y a cette mise à genou partagée devant l’autel de la beauté, et cette volonté de prier pour en garder, et dédoubler, le miracle. Principalement féminine pour première étincelle (si j’ai bien compris chez lui; comme chez moi, mais suis encore moins sûr), mais il ne s’agit pas de corps à corps à consumer, plutôt d’un tendre, parfois ironique, poétique va-et-vient entre forme et mise en forme. Ce miracle entre là et renaître.
(bizarre, j’ai envoyé une réponse hier qui semble avoir disparue, arrggh… Je vais envoyer à nouveau, si je me souviens de ce que j’avais bafouillé… Patience, merci.)
Ben oui, j’ai même répondu. Et je l’ai dans les commentaires approuvés. Moi j’ai tout ! Bizarre vous avez dit bizarre. Tu as bien cherché ? Il y était question de Barthes et du grand Leonard avec des liens dont je te remerciais, n’est-ce pas ? Je l’ai avec réponse
Oui ça c’est OK, je la vois, elle là et c’était ma réponse à ta dernière phrase “Est-ce que les hommes ont cette sensation ?”…
Assez longue, disparue… Bon je remets dans les tuyaux demain. Maintenant la nuit m’avale, belle aprèm à vous!