Ode à Bordeaux

C’est vrai qu’elle a changé la ville où je vis. Si elle garde son étrangeté, que par paresse ou par goût du mystère je ne cherche jamais à élucider, elle a trouvé – retrouvé ? – une grâce, une paix. Et je sais pourquoi : elle ne tourne plus le dos à son fleuve. Il a toujours été là et j’en sais quelque chose moi qui, de cette ville, ne connaissais presque que lui : départs et arrivées par le port. Mais il est plus central, ce fleuve, faisant ainsi rayonner une tranquille luminosité. Elle se laisse regarder, moins pudique. Elle se donne un peu plus à voir et à aimer.

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Il y a quelques jours, j’entendais  l’œnologue Denis Dubourdieu parler du vin avec justesse, précision, simplicité : les trois qualités portaient le breuvage dans une autre dimension : celle de la poésie. Il disait que si l’architecture est de la musique solide, le vin est de la musique liquide. Alors Bordeaux est toute entière musicale.

Nommer les goûts est très difficile, car goûter c’est reconnaître, disait-il encore. Et c’est sûrement pour ces raisons qu’il est difficile de parler de Bordeaux : on ne la connaît pas alors comment la re-connaître ? Ville secrète, grande dame sagement pensive, aux angles particuliers, tangentes et arrondis, aux lumières tantôt toscanes tantôt belges…

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Pour les musiques, j’allais et venais dans un triangle magnifique : Marin Marais, Sainte Colombe, Forqueray, tous trois pour leur élégante et parfaite mélancolie puis j’ai tranché pour Marin, fallait bien, mais j’en ai d’autres dans ma besace et tous me parlent de Bordeaux, je ne sais pourquoi.

Et puis pour les photos, un grand grand merci à Clarisse Mèneret  : elle est, par chance pour moi, ma fille.

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warren
warren
il y a 12 années

Dans son billet du 17 janvier mon amie Lezzles s’est gentiment moqué de tout les journalistes qui parlent du ‘nouveaux’ Bordeaux … tout les clichés sont là …

Bon, c’est en anglais, mais j’ai confiance dans les capacités de tes lecteurs/lectrices!

http://lezzles.blogspot.com/

TempesduTemps
TempesduTemps
il y a 12 années

Le blog de Lezzles est vraiment bien ! Et, pour celui sur ce qu”il faut dire sur Bordeaux”, je ne me suis pas trop sentie idiote, un peu, mais pas
trop ! Je n’ai pas parlé du tram, ni du vin, ni du miroir d’eau : ouffff ! Et j’ai dit rêveuse et non endormie. Ça va pour cette fois. Vous êtes drôlement moqueuses mais c’est parfait.

Roger Allo
Roger Allo
il y a 12 années

Barennes (ah que j’aime ces pseudos qui en dévoilent plus qu’ils n’en cachent de la personnalité de leurs auteurs !) et vous chère Tempes du temps me semblez bien tourneboulés par
l’évocation de votre ville … à en perdre la Raison et le raisonnement !

J’ai écouté l’émission de Colette Fellous (j’aime la suivre dans ses Carnets): Dubourdieu en effet passionnant mais il y avait aussi le jeune Olivier Bleys, un type pas mal lui aussi qui
organise des ateliers d’écriture et a entrepris un tour du monde à pieds réalisé par étapes. Marcher et écrire un verre de Bordeaux à la main, le bonheur ! N’est-ce pas ?

TempesduTemps
TempesduTemps
il y a 12 années

C’est vrai que le jeune Bleys était très intéressant, avec un regard extérieur sur Bordeaux, celui de l’étranger qui passe. Je crois d’ailleurs que c’est lui qui a évoqué la présence du fleuve
dont je parle. Il parlait aussi très bien des bordelais, si je me souviens.

Les Carnets nomades sont toujours passionnants. Comment trouver le temps de tout faire : écrire, marcher, lire, voir, boire un (ou deux) verres de vin, écouter (France-culture et les amis),
écrire encore…

Barennes
Barennes
il y a 12 années

Tout cela est bon. (je ne parle pas seulement du bordeaux). Mais, s’il est vrai que Bordeaux aujourd’hui est très loin d’être cette capitale de l’ennui que nous avons connue dans les années
60-70, il y  manque quand même des bateaux dans le port. On habitait une ville maritime, avec l’avantage sur Marseille ou le Havre (c’est rue de la Crique que j’ai fait mes
classes… etc), de n’être pas limitée par la mer. Il est bien joli le fleuve auquel on ne tourne plus le dos, mais à quoi sert-il ? à faire beau, d’accord, c’est beaucoup (esthétique
d’abord). Bref, sais plus ce que je voulais dire.  

TempesduTemps
TempesduTemps
il y a 12 années

J’entends bien, cher Barennes, votre évocation d’un port avec des bateaux, ce qui est la moindre des choses ! Et cette échappée du fleuve (Ah que j’aille à la mer…). Mais une ville, qu’elle
soit maritime ou fluviale a quand même, malgré l’absence de bateaux, une autre âme, l’âme de l’eau. J’entends bien, oui, j’entends bien d’autant que je l’ai vu ! (Un de mes oncles travaillait à
la Transat). Moi non plus, je ne sais plus ce que je voulais dire… J’aime Bordeaux aujourd’hui, belle et sans bateaux.

horus
horus
il y a 12 années

Pour ceux qui, comme moi, sont secs devant un bon millésime, ou pour ceux qui s’intéressent à la culture de leur terroir -et le vin en fait évidemment partie- l’émission consacrée à Denis
Dubourdieu à laquelle, fort à propos, fait référence Claire est à podcaster d’urgence :

http://www.franceculture.com/podcast/2679421

Chacun de nos sens a sa muse et ses artistes. Pourquoi ne se limiter qu’à la vue et l’ouïe ? La peur de l’excès (il faut avaler du concret !) est un faux prétexte. Le goût est un art aussi et
Denis Dubourdieu est un artiste à sa façon. Je n’avais jamais entendu parler de la terre, de la vigne et du vin comme lui. Passionnant (et très instructif).

TempesduTemps
TempesduTemps
il y a 12 années

Je ne parlais pas que DU bordeaux, espèce de boit-sans-soif ! Il est vrai que ce monsieur Dubourdieu est un artiste en son genre et que ses paroles était très élégantes et
intelligentes. Le goût (d’un bon bordeaux) et le bon goût : voila aussi notre ville.

brigitte giraud
brigitte giraud
il y a 12 années

N’est-ce pas Alger dont Camus disait qu’elle tournait le dos à la ville ?

TempesduTemps
TempesduTemps
il y a 12 années

Non, je crois que Camus parlait d’Oran quand il évoque une ville dont le pire des malheurs est de tourner le dos à la mer… Il aimait trop Alger !

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