– Tamaloù ?
– J’ai mal à mon retour…
– Ah oui, ça fait très mal ça… Mais ton retour où ?
– À moi-même
– Oh… quand t’étais petit, tu veux dire ?
– Ouh non, surtout pas ! le retour là où j’habitais quand j’étais heureux…
– Ahhhhhhh bon… Je vois…
Ben non, on ne voit pas en fait et pourtant, on sent un écho, quelque chose qui frémit et vous chuchote des bribes. On nostalgie. Ce n’est pas tant l’endroit perdu que soi-même dans cet endroit que l’on regrette. Le nostalgique n’explore pas le vrai lieu de son passé, mais des images d’un passé qui apparaît, dans la perspective nostalgique, comme magnifique et innocent. Peut-être un tout petit instant, oui, celui par exemple d’être soulevée en l’air par des mains fermes tenant les deux miennes, me faisant décoller du sol, en apesanteur… Une poussière d’étoile.
Je retourne en Pologne où je ne suis jamais allé fait dire Robert Bober à son personnage de Réfugié provenant d’Allemagne, apatride d’origine polonaise et il sait de quoi il parle.
L’exil qui marche à l’amble avec la nostalgie, les jumeaux mélancoliques : car enfin, les pays quittés offraient-ils tant de douceur ? Pays fantasmés dans le souvenir, magnifiés et lointains comme des îles : revers des rêves, envers des émotions.
Comme chez Kundera dans L’Ignorance, la nostalgie est d’autant plus grande que le retour se fera en pays méconnaissable, quasi inconnu ou n’existant plus. L’enfance, par exemple ?
Pour moi, l’art de la nostalgie, c’est la photographie.
Ce ne sont pas les lieux, c’est son cœur qu’on habite John Milton Le Paradis perdu