» Quel est ce mal ? » demande le vice-consul dans India Song. » L’intelligence » répond une voix de femme. Voilà que tout est dit.
Elle est si précise dans son discours, la Duras. C’est toujours juste et précis même dans le doute, jusque dans le doute.
Certains films sont de l’écriture qui se fait, c’est ainsi du moins qu’aujourd’hui j’en comprends certains. La voix de Viviane Forrester dans India Song, » peau de l’image » selon Marguerite Duras en témoigne. Ce ne sont pas des récitants mais comme le dit Jacques Lacan » des tiers […], loin d’être tiers exclus « . Loin de moi l’idée de paraître pédante mais c’est sous les plumes de Lacan, Fédida et autres Blanchot que j’ai trouvé, éblouie, les lectures les plus éclairées de cette écriture. Jugez plutôt :
Car la limite où le regard se retourne en beauté, c’est le seuil de l’entre-deux-morts, lieu que j’ai défini et qui n’est pas simplement ce que croient ceux qui en sont loin : le lieu du malheur. Jacques LACAN in Cahiers Renaud-Barrault, déc. 1965
Et aussi, du même : […] Vous célébrez les noces taciturnes de la vie vide avec l’objet indescriptible. Et Joël FARGES : Lieu vide, fission ou index, d’une déchirure, entrelacement discontinu : j’y passe, j’articule, je déclenche, j’y voyage. in Marguerite DURAS, collectif, Éd. Albatros, 1988 (pour mémoire = 75 F)
Et enfin, Pierre FÉDIDA, dans le même ouvrage : Ce discours parvient à se taire. Il fait place à la déambulation d’un espace dont seule la musique ou la voix peut indiquer qu’il est le lieu immobile d’une étrange violence.
Je ne relirai jamais La Douleur : c’est le livre le plus à vif, à nu qu’il m’ait été donné de lire. Un voyage qui doit rester unique.