Voilà, c’est comme ça : on veut trop en faire ! On prévoit des tas de trucs, on gigote dans tous les sens, on veut parler de Nantes que l’on a vue quelques heures, on veut parler des amis poètes dont les livres n’arrivent pas à bon port (Salut, Dominique !), on veut évoquer la merveilleuse carte envoyée par des amis très chers et qui dit : LA FEMME EST UNE LOUPE POUR L’HOMME… On voudrait évoquer Charles Juliet qu’on a entendu, vraiment entendu. Bref, on a des appétits insatiables et… on ne fait rien ou autre chose.
Alors, on se met en pause, on arrête la cavalcade des ” je vais le faire ” et on va saluer le fleuve. On tombe sur ça :
juste à côté de ça ; et on ne sait plus qui tient qui. On se dit que c’est une vieille habitude entre eux, les raffiots échoués, la corde bleue qui arrime l’un d’eux à l’arbre. Un pacte noué aux temps passés. On se fait une histoire, celle de l’homme – oui, sans doute un homme – qui a passé la corde bleue au cou de l’arbre en lui glissant quelques mots, bleus aussi.
Pas moyen de savoir pourquoi on est ému à mort devant ces deux gisants, jumeaux dans l’inutilité et l’abandon. Une mort douce avec une corde et un ciel bleus. On s’arrache à cette mélancolie de l’oubli et plus loin on rencontre Yvette, guère plus fringante mais – peut-être grâce au prénom en –ette – dont la fin a quelque chose de plus modeste, moins grave. Devait être guillerette, l’Yvette.
Elle est de l’autre côté du fleuve, côté ville et près de la promenade. Elle a de la visite souvent. En fait, elle dort
C’est vrai qu’elle était petite, Yvette.
Et puis vient, dans toutes cette mélancolie, une furieuse envie d’envoyer paître la langueur ; on remercie très fort celui qui vous a trouvé ça : ça commence comme du Vivaldi et finit comme du Jimmy Hendricks. Et je suis fan de ce ravage ! Larguez les amarres. Marins d’eau douce, bachi bouzouks, ectoplasmes…
(Euh, mettez vos bouées, quand même)
Derrière le bateau échoué
la mer attend,
derrière les notes de Vivaldi
arrive la marée.
Et nous, on est là, entre les deux.
Oui, toujours, quelque chose vient… que quelqu’un regarde passer.
Tout s’arrête sauf les marées.
Parfois, on embarque.
waouh ! sont géniaux ces musiciens encordés à leur archet qui tempête, perdent ni pieds ni doigts de la mer, pour saluer ces vaisseaux effondrés sur l’herbe. Une très belle évocation de la
mélancolie…
On se dit que les archets ne finiront pas le concert : tout déplumés ! J’adore cette espèce de folie qui embarque. Ça requinque. Mais les bateaux-baleines ont fini de tracer… Sont en
laisse.
Je suis certaine que tu vas aimer ceux-là : je les adore. Depuis trois ou quatre ans quand je veux secouer la mélancolie (tu dis langueur…), je me branche sur eux et ça fait un grand trou
d’air…http://www.youtube.com/watch?v=rbTozgoj9OQ
Quand est-ce qu’on embarque ?
Un appel d’air d’ailleurs… mais ça reste quand même bien nordique et neigeux. J’aime beaucoup. Mais c’est très (trop) doux pour quand on a envie d’une secousse genre AC/DC !
Les passagers pour la ballade de mars ne vont pas tarder à embarquer…