Cinéma. Le film commence. Lentement, en silence, le titre, une magnifique calligraphie bleue dont on nous dit qu’elle signifie Pierre de patience ; elle est signée Atiq Rahimi. Le film aussi tout comme le livre sorti en 2008. Sur l’écran, toujours en silence, passent les oiseaux bleus d’une tenture murale. Au moins deux minutes de silence total depuis que le film a démarré. Pas de musique, pas de voix off : RIEN.
Et tout à coup, non loin de moi, la voix affolée d’une femme qui dit à sa voisine : C’est un film muet ? On sent une profonde angoisse dans la question. Insupportable, ce silence.
Non, Madame, ce n’est pas un film muet, c’est un film sur la parole, la puissance du dire, l’éclatement du monde quand ceux – celles – qui sont privés de tout commencent à dire. Quand la seule issue est la folie.
Je ne parlerai pas du film Syngué Sabour, c’est un trop gros morceau pour moi. Juste vous dire d’y courrir, d’y aller avec vos ami(e)s, de regarder d’écouter l’actrice Golshifteh Faharani, d’attacher votre ceinture… Et c’est tout.
À gauche, Atiq Rahimi.
P.S. : Le film est dédié à Nadia Anjuman poétesse afghane assassinée par son mari en 2005, alors qu’elle n’avait que 25 ans.
Ah oui, tu l’avais donc entendue cette femme inquiéte. C’est la même qui réclamait un remontant en sortant de la séance…
Déjà toute à ce qui allait suivre – et quoi de tel que le silence pour obtenir l’attention ? – cette phrase a donné un coup de ciseau dans la belle tenture aux canards bleus… Je ne parle pas de
sonneries de téléphone portable qui me feraient hurler… Mais ce film là résiste à toutes les “armes de distraction massive “
J’espère pour elle qu’elle s’est descendu un triple whisky… Peut-être plutôt le genre ” deux doigts de porto ” ?